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POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE.

nous procure. Ces avantages sont incontestables ; ils iront s’accroissant d’année en année, et ils méritent, à coup sûr, de n’être pas légèrement sacrifiés.

Ainsi, en considérant la situation d’Abd-el-Kader et la nôtre dans les provinces de l’ouest, nous n’y trouvons rien qui nous prescrive impérieusement de rompre le traité et de lui déclarer la guerre. Jusqu’à nouvel ordre, la paix doit être maintenue, telle est notre opinion bien arrêtée ; mais le pourrons-nous, et l’exécution matérielle du traité ne présente-t-elle pas des difficultés qui, en dépit de cette résolution, pourraient susciter la guerre, si elles n’étaient pas résolues d’une certaine manière ? C’est ce qu’il nous reste à examiner.

Jusqu’ici Abd-el-Kader paraît avoir suffisamment exécuté toutes les stipulations claires du traité de la Tafna ; du moins n’avons-nous entendu diriger contre lui aucune plainte sérieuse à cet égard. Mais ce traité contient un article qui n’a pu manquer de susciter des difficultés et d’amener des négociations avec l’émir. Cet article est celui qui fixe les limites du territoire réservé dans la province d’Alger. Il y est stipulé que ce territoire s’étendra à l’est jusqu’à l’Oued-Kaddara et au-delà. Que veulent dire ces mots au-delà ? Signifient-ils seulement l’autre moitié de la vallée arrosée par le Kaddara, ou désignent-ils tout le territoire embrassé par la première chaîne du Petit-Atlas jusqu’au point où elle va se perdre dans la mer, ou bien enfin comprendraient-ils tout le reste de la province d’Alger du côté de l’est jusqu’aux frontières de celle de Constantine ? Évidemment cette dernière interprétation serait forcée. Elle a contre elle la mention même de l’Oued-Kaddara et la borne de la première chaîne du Petit-Atlas assignée à notre territoire. Nous ne conseillerions pas à notre diplomatie de la soutenir. Restent donc les deux autres entre lesquelles on aurait raison d’hésiter, si la chose était d’une grande importance ; mais nous l’avouons, nous ne voyons pas que l’interprétation la plus favorable vaille la peine de devenir une cause de rupture. Ce n’est pas à la possession actuelle de quelques vallées de plus que tient la question de notre puissance en Afrique, d’autant plus que ces vallées ne sont ni une voie de communication avec autre chose, ni une position militaire. Si nous avons du bon sens, nous n’attacherons pas à cette question plus d’importance qu’elle n’en mérite, et nous nous contenterons de la solution, quelle qu’elle puisse être, qui pourra lui être donnée.

Une autre, d’un intérêt plus sérieux si elle était soulevée, serait celle de la communication entre Alger et Constantine. Constantine