Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 14.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.
16
REVUE DES DEUX MONDES.

à la fois d’encouragemens et de reproches, de couronnes et de férules, déterminerait des résultats assez beaux pour qu’on pût s’en armer victorieusement contre les expédiens contraires.

Ce fut dans cet esprit qu’il organisa son institution de jeunes élèves, et s’il ne fallait pas, ici encore, tenir plutôt compte de la puissance de l’homme que de la vertu du procédé, on pourrait ajouter que l’expérience a conclu en faveur de son idée. Il ne semble pas, en effet, que, pour n’être point récompensés, les élèves de New-Lanark se soient montrés moins ardens à l’étude, ni moins retenus, pour n’être pas punis. Les voyageurs qui ont vu les écoles de M. Owen ne tarissent pas en éloges sur les manières gracieuses et charmantes, sur la politesse, la gaieté, l’intelligence de ces aimables enfans. Jamais de querelles parmi eux, jamais de voies de fait ; l’union la plus touchante présidait à leurs amusemens et à leurs études. Par son mouvement intérieur, par la nature de son enseignement, par ses modes d’influence et d’action, l’institution de New-Lanark offrait des analogies frappantes avec ce qui se remarque aujourd’hui dans les salles d’asile, devenues si nombreuses en Angleterre, en Suisse et en France. Ainsi, pour être juste, il faudrait rapporter, en partie du moins, à M. Owen le mérite d’une création que l’on a attribuée jusqu’ici au vénérable pasteur Oberlin, du Ban de la Roche. À New-Lanark, les élèves étaient distribués en diverses classes, qui formaient une échelle d’âges et de leçons, depuis les élémens de la lecture et de l’écriture, tâche des plus jeunes, jusqu’aux notions les plus élevées du calcul, étude de leurs aînés. Cette éducation s’arrêtait, il est vrai, à la dixième année des enfans, époque de leur entrée dans les ateliers ; mais elle était si spéciale et si bien appliquée, qu’ils avaient eu le temps d’acquérir des connaissances assez étendues en géométrie, en sciences mécaniques et en histoire naturelle. La méthode d’enseignement était à la fois simple et féconde ; presque toujours, à la démonstration abstraite on alliait la méthode concrète, de manière à ce que la pensée de l’enfant pût s’appuyer sur une forme saisissable, et suivre dans sa représentation réelle l’objet dont on lui détaillait les propriétés. Ensuite ces études ne s’offraient pas à lui d’une manière aride et austère ; il apprenait l’histoire naturelle en se promenant dans la campagne, la géographie autour d’une vaste mappemonde, sur laquelle il voyageait en compagnie de son moniteur ; l’histoire, à l’aide de planches synchroniques qui en résumaient la substance ; le calcul, sur un vaste tableau, auquel cent yeux semblaient demander à la fois la solution du même problème. Moins exclusif que ne le sont d’ordinaire les in-