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est déjà facile et possible, là où le cours des rivières peut être amélioré de manière à offrir aux bateaux à vapeur un chenal suffisamment profond pendant toute l’année, il y aurait de la précipitation à établir dès aujourd’hui de dispendieux chemins de fer. Ce n’est point par là qu’il faut entrer en matière, ce n’est pas ce qui presse le plus.

Ainsi, par exemple, de Paris à Marseille, l’espace qui doit être le premier comblé par un chemin de fer, ne nous paraît point être la vallée du Rhône. Le chemin de fer de Paris à Châlons-sur-Saône doit passer bien avant celui de Lyon à Marseille, parce qu’il est déjà aisé de se rendre, à très peu de frais, très commodément et en peu de temps, de Châlons à Marseille, ou au moins de Châlons à Arles. Les améliorations que l’on apporte au cours de la Saône et pour lesquelles les fonds sont votés, et celles qu’il est possible d’établir dans le lit du Rhône, justifient l’ajournement de tout chemin de fer entre Châlons et les environs d’Arles. Le chemin de fer de Paris à Châlons mettra Lyon à 24 heures de Paris, ce qui lui importe plus que d’être à 12 heures de l’embouchure du Rhône ; il contribuera bien plus que celui de Lyon à Marseille à multiplier les rapports de Paris et des départemens du nord avec la Méditerranée. Sous le rapport stratégique, le chemin de fer de Paris à Châlons ou à Lyon, a une bien autre valeur que celui de Lyon à Marseille. En matière d’administration intérieure, il présente aussi bien plus d’avantages ; car les localités qu’il rapproche de Paris sont bien plus nombreuses. À l’égard des relations avec Paris, il profiterait à tout ce qui est au midi de Lyon, au même degré que le chemin de Lyon à Marseille, et il desservirait de plus tout ce qui est situé entre Lyon et Paris. Il ne serait même pas impossible de diriger le chemin de Paris à Châlons, de manière à le faire servir sur la moitié de son cours aux communications entre Paris et l’Allemagne. Enfin, en temps de paix, il permettrait de diminuer dans une proportion considérable les forces militaires échelonnées dans le midi, car la garnison de Paris serait alors en même temps la garnison de Lyon. De ce point de vue, le chemin de fer de Paris à Châlons économiserait à l’état sur l’énorme budget du ministère de la guerre, par le fait seul de la réduction qu’il autoriserait dans le nombre des régimens stationnés à Lyon, une somme de quatre à cinq millions par an, représentant à peu près l’intérêt de la somme qu’il aurait coûté.

Il est même très probable, à cause de l’ample allocation dont la Saône a été l’objet en 1837, que la navigation à vapeur, à grande vitesse, pourrait partir d’un point situé en amont de Châlons, de Saint-Symphorien, par exemple, de manière à desservir l’extrémité méri-