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ORIGINES DU THÉÂTRE.

le van, la sphère, la toupie, les osselets[1], la toison, le rhombe, etc. La voie Sacrée, c’est-à-dire, le chemin d’Athènes à Éleusis, retentissait du bruit des instrumens d’airain[2]. La théorie ou procession s’arrêtait de temps en temps pour offrir des sacrifices et chanter des hymnes accompagnés de danses. Les femmes qui suivaient la pompe se rendaient à Éleusis dans des chariots agrestes, semblables à ceux qu’on employait pour la moisson ; mais peu à peu cet usage devint, comme celui de notre Longchamp, une occasion de luxe et de rivalité, qu’une loi de l’orateur Lycurgue essaya vainement de réprimer. Dans l’origine, les femmes échangeaient entre elles du haut de ces chars, et jetaient aux piétons des sarcasmes et des railleries[3]. Ce n’était pas là, d’ailleurs, les seules traces comiques que l’on remarquât dans cette fête. Près du pont du Céphisse, des gens du peuple, postés comme en embuscade, adressaient des paroles moqueuses aux passans et surtout aux personnes éminentes de la république[4]. Cette coutume rappelait qu’en arrivant à Éleusis, Cérès fut ainsi raillée par une vieille nommée Iambé[5].

Le septième jour était consacré aux jeux et aux concours gymniques. Les vainqueurs recevaient une mesure d’orge, en mémoire de ce que Cérès avait enseigné aux habitans d’Éleusis la culture de ce grain. Le huitième était une reprise de la fête en l’honneur d’Esculape qui, étant arrivé trop tard d’Épidaure, obtint, dit-on, qu’on recommençât pour lui l’initiation[6]. Le neuvième était employé au retour. Pendant la durée de ces fêtes, il était défendu, sous peine de mort, d’emprisonner personne pour dettes, et même d’intenter aucune poursuite juridique[7].

DIONYSIES.

Il y avait à Athènes trois sortes de Dionysies : 1o  les Dionysies d’automne, dites Lénéennes, ou du pressoir, à cause du Lénæon, situé dans l’hiéron de Bacchus-aux-Marais. Elles se nommaient encore Dionysies des champs, parce

  1. Clément. Alex., Protrept., cap. II, pag. 45 — Le jeu de la sphère ou de la balle, celui de la toupie et des osselets, étaient des exercices hiératiques avant de devenir des amusemens populaires. Nous trouverons aussi au moyen-âge le jeu de la toupie et celui de la balle ou de la pelote pratiqués par le clergé dans les églises
  2. Plutarch., Alcib., cap. XXXIV, — Pindare a dit : Cérès amie des cymbales » Isthm., od. VII, v. 3.
  3. Il existait un usage à peu près semblable à Alexandrie. Suid., voc. τὰ ἐκ τῶν ἁμαξων σκώμματα
  4. Hesych. et Suid., voc. ΓεφυσίςMeurs., Eleusin., pag. 85. — Græc. feriata, pag. 73.
  5. Apollon., lib. i, cap. VI, § 1. — D’après une autre légende, Iambé était une joyeuse servante qui excita le rire de la déesse par ses saillies plaisantes. Voyez Pseudo-Homer., Hymn. ad Cerer., v. 195, seqq. — N’est-ce pas du nom de cette femme que vient le mot iambe, qui désigna d’abord exclusivement le vers satirique et enjoué ?
  6. Philostr., vit. Apollon., lib. iv, cap. XVIII, pag. 155.
  7. Demosth., in Mid., pag. 631. — Andoc., De myster., pag. 15.