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EXPÉDITION DE CONSTANTINE.

laire, dont la pente, toute fouillée de tombes, est semée de chapelles et de marabouts. Deux bataillons s’établirent dans ce cimetière en amphithéâtre, et couronnèrent la crête d’un petit parapet en briques et pierres sèches, tout percé de créneaux. En arrière, le terrain, moins accentué, ne déterminait pas aussi nettement l’établissement des troupes. Elles furent disposées d’une manière plus centrale, et l’artillerie de montagne fut placée sur le prolongement de grands ravins qui, plongeant dans les parties basses du pays, pouvaient servir de chemin couvert aux Arabes débouchant sur le flanc gauche de la position. La nuit fut calme. Avant la fin du jour, la pluie avait cessé, et les nuages, sans se dissiper, s’étaient élevés. On put, sur le Mansoura, commencer les travaux des trois batteries, et au matin deux étaient presque terminées.

Le 7 fut pour l’ennemi une journée d’audace et de tentatives combinées. Il chercha à faire effort à la fois sur presque tous les points de la vaste courbe que nous décrivions autour de la ville. De bonne heure il débuta par attaquer la droite de Mansoura, mais sans montrer une grande ténacité dans ses projets offensifs. Lorsqu’il vit que, par sa fusillade, loin d’éloigner les tirailleurs des Zouaves et du 2e léger, il les attirait et resserrait leur cercle autour de lui, il se reploya et regagna la porte d’El-Cantara. Autour de Kodiat-Aty il se présenta plus nombreux et plus déterminé. De ce côté, 700 ou 800 hommes, sortis de la place, dirigèrent des attaques sur différens points pour essayer de rencontrer les côtés faibles de la défense. En tête des colonnes se faisaient remarquer des Turcs ou Kolouglis et des cavaliers de haute classe, comme l’indiquaient leurs vêtemens. Les plus résolus des hommes à pied se jetèrent sur la partie la plus forte et la mieux armée, et s’y tinrent long-temps cramponnés ; ils y avaient comme enfoncé leurs griffes. Profitant des ressauts de terrain dont le versant extérieur du cimetière est entaillé, ils étaient montés par ces gradins qui les défilaient presque jusqu’au pied du petit parapet derrière lequel nos soldats étaient embusqués, et l’un d’eux avait planté son drapeau derrière une masure si rapprochée de nos lignes, qu’elle semblait en former un angle avancé. Il fallut, pour leur faire lâcher prise, que de petits détachemens de la légion étrangère et du 3e bataillon d’Afrique s’élançassent par-dessus leurs retranchemens pour aller fouiller avec la baïonnette tous ces creux de terrain, dans lesquels leurs feux ne pouvaient plonger. Les Arabes ne soutinrent pas le choc ; mais, rassurés par les facilités de leur retraite, que protégeait la mousqueterie de la place, ils se laissaient approcher à petite portée, et ne fuyaient qu’en tirant un coup de fusil bien ajusté. Sur le flanc gauche de la position, l’ennemi se montra aussi actif, mais moins hardi. Il passait de ravin en ravin, de colline en colline, essayant tous les terrains, mais sans paraître en trouver un seul qui lui semblât convenable pour servir de base à une attaque sérieuse. Cependant il déboucha assez vivement d’une place d’armes que lui faisaient les ravins en face du 26e de ligne, et une compagnie de ce corps, qui à ce mouvement se porta en avant, eut son capitaine tué. En arrière, les cavaliers arabes étaient descendus peu à peu du