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dos, très clair-semé sur le ventre et la poitrine. Il n’y en avait pas du tout au visage, si ce n’est le long des joues et sous le menton ; dans ces parties il était même plus long que partout ailleurs.

« Chez la plupart des animaux, il y a deux sortes de poils ; savoir : les poils soyeux, qui sont droits, et les poils laineux, qui sont fins et sinueux. Chez notre animal comme chez l’homme, cette dernière espèce de poil manquait ; seulement, sur les lèvres, on voyait quelques brins de barbe frisés et de couleur grisâtre ; il y en avait de même nature et de même couleur au pubis. Sur les membres antérieurs, la disposition des poils était fort remarquable ; car, tandis que chez les singes et chez tous les quadrupèdes en général, ils s’avancent uniformément de l’épaule vers les doigts, là ils avaient trois directions différentes ; sur le dos de la main ils étaient en travers, sur l’avant-bras ils remontaient, et sur le bras ils descendaient. C’est précisément ce qui s’observe dans l’espèce humaine. »

Tyson énumère encore un grand nombre de points d’organisation par lesquels son pygmée ressemble à l’homme et se distingue des singes ; il n’en compte pas moins de quarante-huit ; je me contenterai d’indiquer les principaux.


Voici ce qu’offre de plus remarquable l’examen des viscères.

« Cerveau très volumineux, présentant, en apparence, toutes les mêmes parties que le cerveau humain, et semblablement disposées[1].

  1. Le cerveau, dit à cette occasion notre anatomiste, étant généralement considéré comme le siége le plus immédiat de l’ame, on peut croire, vu la grande disparité qui existe entre l’ame de l’homme et celle de la brute, qu’on trouvera une différence très grande dans l’organe ; cependant j’ai reconnu à ma grande surprise, en disséquant le pygmée, que son cerveau ressemble, jusque dans les moindres détails, à celui de l’homme, et à tel point, que si j’en donnais ici la description, on pourrait croire que c’est une page détachée d’un traité d’anatomie humaine. Il n’y aurait guère de différence que dans les dimensions, et même je dois faire remarquer que, comparativement au reste du corps, le cerveau du pygmée était extrêmement grand ; la dure-mère étant en grande partie enlevée, il pesait encore douze onces moins un gros. Les académiciens français qui nous ont donné la dissection du singe, remarquent qu’ils ont trouvé le cerveau proportionnellement très grand, « il pesait deux onces et demie. » On voit que c’était tout autre chose encore dans notre pygmée dont la taille cependant ne dépassait pas celle d’un magot.

    S’il fallait, poursuit Tyson, admettre avec Vesale que la proportion du volume du cerveau à celui du corps donne la mesure de l’intelligence d’un animal, on serait forcé de conclure, pour le cas qui nous occupe, que le pygmée ne le cède point en intelligence à l’homme ; mais le principe de l’anatomiste italien est un de ceux qu’on ne peut admettre sans restriction. Je ferai remarquer en passant que Vesale s’est encore fort écarté de la vérité en disant que la composition du cerveau est la même chez tous les vertébrés. »