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ILLUSTRATIONS SCIENTIFIQUES.

d’une manière évidente à tous, la raison cachée qui y est contenue ; arracher l’apparence trompeuse qui les montre différentes, et manifester, dans un fragment du système, un fragment de la loi universelle, c’est une des œuvres les plus difficiles de la science moderne ; c’est aussi une de celles qui importent le plus à son avancement et qui honorent le plus les efforts du génie.

M. Ampère, dans ce domaine des découvertes laborieuses et influentes, a signalé son nom par ses travaux éminens et définitifs sur le problème, si compliqué au premier coup d’œil, des phénomènes électro-magnétiques. Comme ces travaux formeront dans l’avenir la gloire principale de M. Ampère, et lui assureront un nom dans les annales de la science, il est important d’exposer, avec quelque détail, en quoi ils ont consisté. On avait déjà remarqué à différentes fois que l’électricité exerçait une action sur l’aiguille aimantée. Ainsi, la boussole, sur des vaisseaux frappés du tonnerre, perdait la propriété de se tourner vers le nord et de marquer la route du bâtiment. Quand ces flammes électriques que les marins connaissent sous le nom de feux Saint-Elme brillaient avec un vif éclat à la pointe des mâts, l’aiguille était, de la même façon, dépouillée de sa faculté caractéristique : ou bien les pôles en étaient renversés, de sorte que la pointe, qui se dirige vers le nord, se dirigeait vers le sud ; ou bien elle restait complètement insensible à l’action magnétique de la terre, et demeurait immobile dans toutes les positions. De fortes décharges d’électricité, produites avec la bouteille de Leyde ou une grande batterie, avaient modifié de la même manière, dans les expériences instituées pour cet objet, les aiguilles aimantées. On en avait conclu que l’électricité agissait par son choc, et l’on en était resté là. L’influence réciproque de cet agent et du magnétisme était à peine soupçonnée, et rien ne mettait encore sur la voie des faits merveilleux et des importantes conséquences que contenait l’examen de l’action entre une petite aiguille et un fil d’archal traversé par un courant électrique.

M. Œrsted, physicien danois, qui s’entretenait depuis long-temps dans des inductions théoriques sur l’essence des fluides électrique et magnétique, découvrit, en 1820, un phénomène capital, qui est devenu le point de départ des travaux subséquens. Ce qui avait échappé à ses prédécesseurs, et ce qui n’échappa point à M. Œrsted, c’est une condition à laquelle nul n’avait songé : à