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ILLUSTRATIONS SCIENTIFIQUES.

mathématiciens, ni autre chose que psychologues, sont toujours restés par rapport aux classes des idées dans une abstraction et dans un vague qui dépeuple l’ame et en mortifie, à mon gré, l’étude. Par malheur, si M. de Biran se tient trop étroitement à cette volonté retrouvée, à cette causalité interne ressaisie, comme à un axe sûr et à un sommet, d’où émane tout mouvement, M. Ampère, moins retenu et plus ouvert dans sa métaphysique, alla et dériva au flot de l’idée. À travers ce domaine infini de l’intelligence, dans la sphère de la raison et de la réflexion, comme dans une demeure à lui bien connue, il alla changeant, remuant, déplaçant sans cesse les objets ; les classifications psychologiques se succédaient à son regard et se renversaient l’une par l’autre ; et il est mort sans nous avoir suffisamment expliqué la dernière, nous laissant sur le fond de sa pensée dans une confusion qui n’était pas en lui.

En attendant que la seconde partie de sa classification, qui embrasse les sciences noologiques, soit publiée, et dans l’espérance surtout qu’un fils, seul capable de débrouiller ces précieux papiers, s’y appliquera un jour, nous ne dirons ici que très peu, occupé surtout à ne pas être infidèle. M. Ampère, dans une note où nous puisons, nous indique lui-même la première marche de son esprit. Il voulait appliquer à la psychologie la méthode qui a si bien réussi aux sciences physiques depuis deux siècles : c’est ce que beaucoup ont voulu depuis Locke. Mais en quoi consistait l’appropriation du moyen à la science nouvelle ? Ici M. Ampère parle d’une difficulté première qui lui semblait insurmontable, et dont M. le chevalier de Biran lui fournit la solution. Cette difficulté tenait sans doute à la connaissance originelle de l’idée de cause et à la distinction du moi d’avec le monde extérieur. Il nous apprend aussi que, dans sa recherche sur le fondement de nos connaissances, il a commencé par rejeter l’existence objective et qu’il a été disciple de Kant : « Mais repoussé bientôt, dit-il, par ce nouvel idéalisme comme Reid l’avait été par celui de Hume, je l’ai vu disparaître devant l’examen de la nature des connaissances objectives généralement admises. » Tout ceci, on le voit, n’est qu’indiqué par lui, et laisse à désirer bien des explications. Quoi qu’il en soit, en s’efforçant constamment de classer les faits de l’intelligence selon l’ordre naturel, M. Ampère en vint aux quatre points de vue et aux deux époques principales qui les embrassent, tels qu’il les a ex-