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révolutions de quelques astres, et qu’un télescope me serait bien inutile, en vérité.

Un homme qui, du haut de la cime immense où le ciel l’a mis, ne juge pas avec moins de sagacité que s’il était placé aussi humblement que nous le sommes, nous autres, définissait le gouvernement constitutionnel : « Un état où toutes les intelligences d’un pays, au lieu d’être employées au salut commun, sont occupées à se combattre. » Nous n’avons pas le droit de parler ainsi, et les institutions qui nous ont dotés, avec la liberté, de tant de grands talens, et qui ont mis au jour, d’un côté du détroit, Pitt, Fox, Canning, et de l’autre, Benjamin Constant, Foy et Casimir Périer, doivent assurément nous rendre glorieux et nous êtres chères ; mais il est bien permis de se demander, dans un moment de rêverie et de loisir, ce que serait la France, s’il existait une puissance assez forte pour contraindre M. Guizot à tendre la main à M. Mauguin, à M. Odilon Barrot, à M. Berryer, et même à M. Thiers ! Quelle France que celle-là, et comme elle marcherait tout d’un pas, pour le bien de l’humanité, à la domination de l’Europe et du monde ! Dieu nous garde du despotisme qui rend compactes les nations, et qui les réunit d’une main souvent bien rude ; mais défendons-nous un peu de l’excès de liberté et d’indépendance qui disjoint les peuples et qui les éparpille ! Nous voilà montés bien haut, monsieur ; redescendons, s’il vous plaît, vers nos affaires d’état.

Il me semblait à moi, en voyant les choses tout en gros, et du haut d’une tribune de la chambre des députés où je vais quelquefois m’asseoir, que nous avions un ministère, un ministère de réaction, si vous voulez, ou d’ordre, si vous l’aimez mieux, privé de talent de tribune, selon les uns, doué d’une sage et silencieuse réserve, selon d’autres qui sont mieux informés peut-être, mais un ministère enfin, un ministère avec toutes ses qualités et ses attributions, avec un chef, — ou deux, avec un ministre des affaires étrangères qui parle pour le ministre de l’intérieur au besoin (et ce besoin vient souvent) ; avec un ministre de l’instruction publique qui, à son tour, ou plutôt hors de son tour, a de l’éloquence pour le ministre des affaires étrangères ; un ministère avec des amis nombreux qui le ruinent