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LE MYSORE.

vèrent Hyder-Aly général en chef, et revêtu, comme régent, de l’autorité souveraine. La haine qu’il avait conçue contre les Anglais, d’abord ses alliés dans la querelle de succession entre Mohamed-Aly et Chûnda-Saheb, était alors parvenue à son plus haut degré d’animosité. Née d’intérêts opposés, cette haine remontait à l’époque des siéges de Trichinopoly, que le nabab du Carnatic avait consenti plusieurs fois à lui céder pour prix de son assistance victorieuse ; mais toujours la politique anglaise était intervenue pour contrarier ces plans, et elle avait fini par l’empêcher de prendre possession d’une ville qu’il convoitait ardemment. Hyder s’empressa d’accueillir des étrangers qui, partageant ses ressentimens, promettaient de seconder ses vues belliqueuses. C’étaient là des auxiliaires bien précieux si l’on songe qu’à cette époque il travaillait à introduire la tactique européenne dans ses troupes. Mais tous ses efforts restèrent incomplets. Toute innovation épouvantait les Hindous, qui formaient la principale force numérique de ses armées ; ils refusaient d’abandonner leurs vieilles traditions, leurs flèches, leurs fusils à mèche, et décourageaient les musulmans naturalisés parmi eux ; les ordres du prince, qui les avait soumis à des exercices régimentaires, étaient impuissans à leur donner confiance dans la supériorité de ces essais de réforme. Avec de pareils soldats, la méthode d’Hyder, et c’est là encore ce qui prouve son génie, dut être, dans tout le cours de ses campagnes, d’éviter les batailles rangées et de harceler constamment l’ennemi. Il poussa les réformes jusqu’à bannir les femmes de ses armées ; son fils cependant reprit l’usage de se faire suivre de son Zenana (harem) ; dans une de ses guerres contre les Anglais, ceux-ci le lui enlevèrent. Il fallut à Hyder une habileté peu commune pour déjouer les intrigues suscitées contre sa puissance ; il parvint sans guerre civile, sans commotions intérieures, à monter sur un trône qu’il avait élargi par ses conquêtes, et où la stabilité des coutumes, jointe à l’inimitié des grands de la cour, secrètement payée par l’or anglais, maintenait encore la chétive figure des légitimes souverains hindous.

À cette époque, l’empire mogol croulait de toutes parts, et l’Inde entière, réveillée par l’appât du gain, convoitait chacun de ses débris ; c’est alors qu’une puissance nouvelle, création d’un seul homme, s’éleva au centre de la péninsule. Merveilleusement situé sur un plateau qui domine les deux mers, immense citadelle défendue par les Ghates, qui ne laissent pour y monter de l’une ou l’autre des côtes de Malabar et de Coromandel, que de rares et étroits passages, le Mysore jeta un éclat d’autant plus vif et soudain, que ses commencemens, presque inaperçus, avaient excité peu de jalousie. Hyder ajouta rapidement à ses lauriers la conquête du Canara, les tributs de plusieurs villes considérables du Malabar, et