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les coteaux offrent, en général, des qualités si favorables, que l’on pourrait indistinctement rassembler, dans un coin de l’Europe, presque tous les objets de culture connus sur le globe[1]. On pourrait faire de ce pays le plus beau canton de l’Europe. — Il y a, dit-il encore en parlant de la Moldavie, peu de contrées où la distribution des plaines, des collines, des montagnes, soit aussi admirable pour l’agriculture et la perspective. La nature est plus grande et plus majestueuse en Suisse ; ici elle est plus douce et plus agréable. » Mais la nature est impuissante, et ses dons sont perdus sans le secours d’une activité intelligente. L’homme peut corrompre tout ce qui vient de Dieu. Là où manquent les arts et le commerce, le plus beau sol reste inculte ; tant de richesses sont foulées aux pieds.

Le luxe crée dans ce pays des besoins inconnus, et l’industrie ne donne pas des ressources équivalentes. On augmente non la production, mais la consommation. On a recours aux industries étrangères ; la laine, la soie, le lin, dont le pays abonde, passent à l’étranger, se métamorphosent, sous sa main, en produits utiles d’une valeur triple, et reviennent aux Valaques, qui les rachètent à un prix exorbitant. L’Autriche fournit à la Moldavie et à la Valachie tous les ustensiles de ménage ; les fers, la verroterie, la poterie, les toiles, les calicots, arrivent des autres parties de l’Allemagne. La foire de Leipsig donne les draps, la soierie, les tulles, les dentelles et les nouveautés. Ces magnifiques voitures qui encombrent les rues des deux capitales moldave et valaque sont fabriquées à Vienne. Tous les chevaux de selle et de trait qui font l’orgueil des riches, viennent des haras de la Hongrie. Que les ennemis des lois prohibitives visitent la Valachie et la Moldavie ; ils y verront la terrible réalisation de leur axiome favori, laissez faire et laissez passer. À côté d’une exportation insignifiante ils verront une importation considérable et croissante. Un luxe plus noble et plus louable, la lecture des livres et des journaux étrangers, prélève aussi un impôt sur ce riche pays, que les meilleurs penchans appauvrissent encore. Les capitaux manquent partout ; le taux légal des intérêts est de 12 p. 100. L’extrême dépréciation que la monnaie a subie, depuis

  1. Il faut excepter, bien entendu, les plantes des tropiques et celles des latitudes très méridionales.