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les forces ministérielles, nous admettons que ces 50 voix appartiennent toutes au ministère.

Une autre fraction lui appartient encore, celle des légitimistes ralliés. Ils sont 25 en tout :

MM. Agier, Avril, Bastard, Bresson, Cambis d’Orsan, Crignon de Montigny, D’Amilly, Dandigné de la Blanchaye, de Drée, D’Hunolstein, Dudouyt, Duprat, D’Entraigues, D’Oberlin, Falguerolles, Malaret, Meynard, Montépin, La Pinsonnière, Portalis, Rouillé de Fontaine, Salvandy, Tavernier, Tilly, Vauguyon.

La plupart étaient députés sous la restauration, et quelques-uns avaient contracté une sorte d’engagement dans une de ces galantes nuances d’opposition comme on en faisait alors, s’avançant juste autant qu’il le fallait pour se donner un air d’émancipation et de libéralisme, et ne pas compromettre leur caractère de purs légitimistes. La révolution de 1830 vint les surprendre au milieu de ces innocens et honnêtes calculs de vanité humaine, et ils en furent tellement épouvantés, que, ne sachant plus à quel saint se vouer, ils se vouèrent à celui de la doctrine. Mais nulle mesure d’ordre n’a pu encore les guérir de leur terreur. Le nom de prolétaire leur semble un nom séditieux qu’il faudrait rayer de notre langue. Le mot de république leur donne une sueur froide. Dans leur état perpétuel d’anxiété, le pavillon doctrinaire lui-même est encore pour eux trop large et trop mal fermé ; on y entend le bruit de la rue et le mouvement de la foule. Ce sont eux qui souvent entraînent les doctrinaires, car pour certaines natures d’esprit la peur est contagieuse. Un jour ces hommes absorberont la camarilla de M. Guizot ; un jour les doctrinaires, auxquels ils ont d’abord demandé asile, viendront leur en demander un et se retrancheront avec eux dans le même système de défiance perpétuelle, dans la même frayeur.

Il n’y a dans cette fraction aucun orateur. Un seul d’entre eux, M. de Salvandy, s’est fait une réputation. Sous le règne de Charles X, M. de Salvandy avait entrepris de régenter la monarchie et de la censurer. Quand la légitimité quitta le trône, il se remit, par une sorte de sentiment chevaleresque, à la louer et à la défendre. On le vit alors fréquenter les salons du faubourg Saint-Germain et médire assez spirituellement des journées de juillet et de leurs conséquences. L’opposition aristocratique était pour lui comme une fleur à sa boutonnière, comme une belle boucle artistement faite dans sa chevelure noire, comme une épingle de diamant à son jabot. Depuis, il s’est rapproché du gouvernement, il a tendu la main aux doctrinaires. Il représente le parti des légitimistes ralliés à la tribune et dans le Journal des Débats. Ses articles de journaux, son éloquence parlementaire, trahissent toujours par quelque côté l’auteur de