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LA RÉPUBLIQUE D’ANDORRE.

âge, sont écrits à chaque pas dans toutes les couches, dans tous les blocs, par des hiéroglyphes qui défient ceux de nos obélisques, c’est-à-dire par des coquilles parfaitement conservées. Puis les volcans vinrent, non pas de ces volcans rapetissés qui, au jour de leur plus grande fureur, se bornent à ensevelir Herculanum et Pompéia dans un torrent de cendres, ou à troubler le sommeil des lazzaroni,

    fait arrêter sans délai le prévenu. Le viguier prend aussi toutes les mesures qu’il juge convenables, et met, s’il le faut, tout le pays en armes.

    Le viguier présent commence les interrogatoires, aidé du notaire-secrétaire de la vallée, et en donne avis sur-le-champ au viguier de France. Celui-ci, réuni à son collègue, prend connaissance de l’affaire ; ils continuent ensemble les informations, et lorsqu’ils jugent qu’il peut y avoir lieu à peine afflictive, ils indiquent au syndic le jour où la cour doit se réunir et se constituer. Le syndic convoque pour le jour fixé le conseil général, qui s’assemble au Palais de la vallée, à la salle de ses séances. Les viguiers, dans leur costume, sont introduits par quatre membres, ainsi que le juge d’appel des causes civiles, mandé pour cette circonstance. Une messe du Saint-Esprit est célébrée dans la chapelle du Palais ; après la messe, le conseil général souverain nomme deux de ses membres pour être présens aux opérations de la cour, et surveiller le maintien des formes et usages du pays, après quoi le conseil se sépare, et la cour se trouve constituée.

    Le viguier de France préside cette cour souveraine, qui a les pouvoirs les plus étendus pour faire comparaître tout individu et suivre partout les traces du crime.

    La cour reçoit avec ou sans serment tous les témoignages qu’elle croit utiles à former sa conviction. L’accusé a un notaire ou toute autre personne de son choix pour l’aider dans sa défense. Il peut faire entendre des témoins à décharge. On appelle vulgairement l’avocat de l’accusé Rahonador, ou parleur.

    Toute autre justice est alors suspendue. Les juges civils ne peuvent rendre aucun jugement. Les bailes et les consuls se tiennent à leur domicile, afin d’être toujours prêts à faire exécuter les ordres de la cour.

    La procédure étant finie, les viguiers seuls ont voix délibérative pour rendre le jugement. Le jugement rendu, la cour fait savoir au syndic que ses opérations sont terminées ; celui-ci réunit de nouveau le conseil, et c’est en sa présence et sur la place publique, où la cour se rend, escortée par le conseil général, que le jugement est prononcé.

    Les jugemens de la cour sont sans appel ; ils sont exécutés dans les vingt-quatre heures. On suit dans la procédure et la rédaction des pièces les formes et usages établis de temps immémorial. En cas de doute, on consulte les deux membres du conseil général présens à la cour, et, au besoin, les archives de la vallée. Lorsque la sentence a été exécutée, le conseil général se réunit encore, et la session de la cour est close avec pompe.

    Il est très rare que la cour criminelle soit convoquée. Il se commet fort peu de crimes dans l’Andorre.

    Lois. — Il n’y a pas de lois pénales écrites ; il n’existe que quelques réglemens relatifs aux formes à suivre dans les procès criminels et civils. Les viguiers appliquent en leur ame et conscience la peine qu’ils croient convenable d’après leur conviction, comme des jurés.

    Les bailes, à qui sont déférées les causes civiles, jugent selon leur bon sens ; et pour la procédure, ils suivent plutôt les usages et habitudes que des lois positives.

    Police. — La haute police est du ressort des viguiers. La police intérieure, relative aux étrangers qui séjournent ou qui passent, est du ressort des consuls et des bailes, mais sous la surveillance des viguiers, qui peuvent faire expulser du pays tout étranger dont ils croient la présence nuisible.

    Pénalité religieuse. — On conserve encore quelques punitions canoniques qui contribuent puissamment à maintenir l’ancienne sévérité des mœurs. Il arrive quelquefois que, pour des