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LA RÉPUBLIQUE D’ANDORRE.

affectueuse, cette absence complète de procès en matière d’héritages, cette moralité, cette stabilité, cette vénération pour l’expérience, sont des phénomènes que vous observerez, quand il vous plaira, dans le pays d’Andorre. Après Colomb, Magellan ou Cook, après les voyages de Ross et de Parry au pôle glacial, quand toute la terre semblait explorée et rebattue, il reste donc, vous le voyez, un nouveau monde à découvrir. Si vous étiez bien en cour (je suppose qu’il y ait encore une cour), ne pourriez-vous pas conseiller d’organiser à cet effet une expédition composée de tout ce qu’il y aura de plus hardi et de plus bouillant parmi notre jeunesse novatrice[1] ?

  1. Je joins ici quelques détails sur la constitution de l’Andorre.

    ORGANISATION POLITIQUE.

    L’Andorre s’étend sur un espace d’environ douze lieues du nord au sud, et de dix de l’est à l’ouest. Il est divisé en six paroisses ou communes, qui sont : la ville appelée Andorre, chef-lieu, d’où le pays a pris son nom, et les villages de Saint-Julia-de-Loria, Encamp, Canillo (autrefois Canillan), Ordino (autrefois Ordinans) et la Massana. À ces six communautés sont annexés une vingtaine de hameaux et diverses habitations isolées, formant au moins quarante suffragances.

    Conseil souverain. — L’Andorre est gouverné par une réunion de vingt-quatre membres appelée conseil général et souverain. Les vingt-quatre membres de ce conseil sont : 1o  les douze consuls qui administrent les six paroisses ; 2o  les douze consuls qui étaient en fonctions l’année précédente. Ces derniers s’appellent conseillers. Il a trois modes de délibération. Dans le premier mode, il n’y a qu’un membre présent par paroisse ; dans le second, formé alors de douze personnes, il y en a deux par paroisse ; dans le troisième, tout le conseil est convoqué. Le syndic peut réunir la première, la seconde ou troisième assemblée selon l’importance de l’affaire.

    Le conseil général se réunit dans toutes les circonstances où il survient des affaires extraordinaires ; mais il tient régulièrement cinq sessions annuelles : à Noël, à Pâques, à la Pentecôte, à la Toussaint et à la Saint-André. Dans ces réunions solennelles, le conseil souverain, avant de s’occuper d’affaires, entend la messe dans la chapelle du Palais, ou maison commune de la vallée, et nulle autre personne n’y est admise.

    Indépendamment de ses attributions générales, le conseil connaît de tout ce qui concerne les servitudes rurales et urbaines, les biens communaux, bois, eaux, pêche, chasse, chemins, poids et mesures. Il lui appartient aussi de prohiber, s’il est nécessaire, la sortie des grains, etc.

    Syndic-procureur-général. — Le conseil souverain nomme parmi ses anciens membres le syndic-procureur-général de la vallée d’Andorre. Cette place est à vie, à moins de démission ou de destitution pour motifs extraordinaires. Le syndic est président du conseil ; c’est lui qui le convoque. Dans les occasions extraordinaires, il fait les propositions qu’il croit utiles, et sur lesquelles le conseil a ensuite à délibérer.

    Dans les réunions annuelles, le syndic rend compte de sa gestion, et propose les divers objets des délibérations. Chaque membre peut aussi faire part de ce qu’il croit avantageux au pays. Tout se décide à la pluralité des voix. Le syndic demeure chargé de l’exécution.

    Consuls. — Avant le 1er  janvier, époque où la session de la Noël doit être terminée, les six paroisses présentent chacune, pour leurs nouveaux consuls, des candidats pris toujours parmi les chefs des familles notables. Le conseil souverain en choisit deux pour chaque paroisse ; la nomination faite est notifiée sans délai ; et le 1er  janvier, après une messe solen-