Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/600

Cette page a été validée par deux contributeurs.
596
REVUE DES DEUX MONDES.

vous pouvez désirer. Aimez-vous, au contraire, la vie sédentaire, les jouissances domestiques, ce qu’on appelle les études de mœurs ? MM. Court, Franquelin, Roqueplan, se chargent de récréer vos yeux par une foule de représentations empruntées à cet ordre d’idées et d’habitudes, et souvent pleines de talent et d’esprit. Fatigué de la monotonie de la vie française, aspirez-vous après l’éclatant soleil et les pittoresques mœurs de l’Italie ? MM. Schnetz, Édouard Bertin, Winterhalter, vous transporteront au sein de cette patrie de la beauté par la chaleur et la fidélité de leurs pinceaux. Avez-vous, par hasard, juré une fidélité désespérée à la mythologie antique ? il y a toujours à chaque salon, surtout parmi les sculpteurs, plusieurs traînards du paganisme ; et d’ailleurs vinssent-ils à manquer, il vous resterait toujours les doctrines de l’Académie des Beaux-Arts, les concours pour les prix de Rome, et les regrets de certains feuilletonistes. Préférez-vous sagement les gloires et les souvenirs de notre Europe moderne ? vous avez MM. Scheffer, Delaroche, Hesse, et d’autres qu’on pourrait nommer à côté d’eux, qui ont conquis une place honorable dans l’histoire de l’art pour l’école française de nos jours. En un mot, tout le monde en a pour son goût ; et si la caricature réclame par le fait une place dans chacun de ces divers genres, elle peut le faire avec bon droit, parce qu’elle n’en envahit aucun, et que sa modestie ajoute à sa vérité. Il n’y a que dans le cas où vous seriez catholique, que toute satisfaction vous est refusée ; il ne vous reste d’autre ressource que de voir la religion, la seule chose au monde qui n’admette pas un côté comique, envahie par la caricature ; et c’est encore le nom le plus doux qu’on puisse donner, sauf un très petit nombre d’exceptions, aux parodies, tantôt horribles, tantôt ridicules, qui couvrent chaque année les murs du Louvre, et s’en vont de là souiller nos églises sous le titre mensonger de tableaux religieux.

Mais je vous demande trop, lecteur, en supposant que vous soyez catholique ; je veux seulement que vous ayez quelques notions de la religion, que vous l’ayez tant soit peu étudiée dans ses dogmes d’abord, puis dans son influence sur la société à une époque où elle était souveraine : je ne vous demande pas des convictions, je ne vous suppose que quelques idées et quelques souvenirs, puisés par vous-même à l’abri de la routine des écoles classiques. Voilà tout ce que j’exige, et cela étant, je vous prends par la main, et je vous conduis à la première église venue. Que ce soit une cathédrale ou une paroisse de village, peu importe. Passons même devant la cathédrale, si c’est une cathédrale des anciens jours, sans nous y arrêter ; nous perdrions de vue le but immédiat de notre visite, tristement confondus que nous serions à la vue de ces glorieuses façades mutilées de mille façons par la haine et l’ignorance, quelquefois remplacées, comme à la sublime basilique de Metz, par un horrible portail de théâtre, en l’honneur de Louis XV ; à la vue de ces vitraux défoncés et suppléés par des verres blancs ou des flaques de bleu et de rouge ; à la vue d’un badigeon beurre frais,