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COURS D’HISTOIRE ANCIENNE.

auquel je crois être parvenu, n’est point le fruit d’une étude complète, etc. » Sans nul doute, M. Lenormant ne se serait point arrêté aux rapprochemens que nous venons de voir, s’ils n’avaient été pour lui de la nature la plus évidente, nous aimons à lui rendre cette justice, tout comme il se la rend à lui-même ; il a vu « jaillir à ses yeux une abondante lumière, » nous sommes loin de le contester. Mais nous pensons que l’on doit se tenir sur ses gardes, quand par hasard on saisit à première vue des similitudes fondamentales entre deux objets dont on ne connaît bien ni l’un ni l’autre. Nous pensons qu’il faut alors se défier de l’abondance de la lumière ; car de pareille abondance il n’est trop souvent résulté que des éblouissemens. Vues de loin, bien des choses se ressemblent ; approchez, ce sera blanc et noir. Mais c’est m’arrêter trop long-temps ; je conclus en disant que si la blancheur de tous les fils de Cham est un point que l’on puisse concéder au jeune professeur, il n’en est pas de même de l’identité fondamentale des idiomes chamites et sémites.

Arrivons enfin à la race de Sem. J’ai dit que M. Lenormant, caractérisant le groupe des populations japétiques par la communauté de langage, et celui des populations chamites par la communauté de couleur, n’avait assigné à la race de Sem aucun signe distinctif. Cela n’est pas entièrement exact. M. Lenormant regarde la race de Sem comme une race secondaire, tandis qu’il fait des deux autres des races primitives. Sur quoi base-t-il cette distinction ? Les rapports qu’il a cru voir entre l’idiome des Sémites et celui des Chamites, les amalgames qu’il a supposés entre ces deux grandes familles, l’ont bien mis sur la voie ; mais c’est un passage de l’historien Justin qui l’a conduit à soulever entièrement le voile sous lequel jusqu’à lui se cachait la vérité. Arrêtons-nous quelques instans sur ce passage curieux qui modifie et complète les récits de Moïse d’une manière tout-à-fait inattendue.

Justin, abréviateur de l’histoire universelle de Trogue-Pompée, cite Ninus, le fondateur de l’empire assyrien, comme le premier souverain qui ait tenté d’accroître sa puissance par des conquêtes. Il est vrai, ajoute-t-il, que, dans les temps antérieurs, nous trouvons un Vexoris, roi d’Égypte, et un Tanaüs, roi des Scythes, dont le premier alla jusqu’au Pont-Euxin et le second jusqu’à l’Égypte ; mais l’un et l’autre, laissant tranquilles leurs voisins, allaient au loin chercher, non point un accroissement à leur empire, mais seulement de la gloire pour leurs peuples. Cette manière de présenter les faits semble annoncer que notre historien ne croit pas bien fort à l’authenticité