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COURS D’HISTOIRE ANCIENNE.

ticulier que le tableau des descendans de Noë a dû être complété postérieurement à Moïse. Assurément cette manière de voir n’amoindrit point la seconde des difficultés que nous avons signalées ; bien loin de là. Il y a plus : M. Lenormant admet comme appartenant à une même population, les dénominations semblables ou à peu près semblables, qui se rencontrent, soit dans la même généalogie, soit dans les généalogies parallèles de Sem, de Cham et de Japhet. Quand je dis à peu près semblables, j’entends que M. Lenormant admet l’identité des noms toutes les fois que les lettres dont ils sont composés sont susceptibles de permutation dans les divers dialectes d’une même famille de langues ; c’est bien là une difficulté nouvelle ajoutée aux précédentes.

Du principe admis par M. Lenormant, il résulte nécessairement l’apparition d’un certain nombre de contradictions dans les récits de Moïse. On pourrait, dans ces contradictions, voir un embarras ; pas du tout. M. Lenormant y voit d’abord une preuve de la parfaite bonne foi de l’écrivain ; en effet, dit-il, « si Moïse avait été préoccupé d’un système, s’il avait fait violence aux faits pour mieux l’établir, son premier soin sans doute eut été de faire disparaître les contradictions qu’il trouvait entre les traditions reçues. » Bien plus, l’apparition du même nom ou d’un nom à peu près semblable, dans les rangs des descendans de Cham en même temps que dans ceux des fils de Sem, a mis M. Lenormant sur la trace d’un fait fort important, celui des amalgames réitérés des fils de Sem avec les fils de Cham. Ces amalgames, en effet, expliqueraient fort bien la confusion introduite dans les généalogies ; les races mêlées se rattachant tantôt aux Sémites, tantôt aux Chamites.

C’est à l’aide de deux principes différens que M. Lenormant supplée au silence de Moïse sur le caractère distinctif des trois grandes familles. Les fils de Japhet, que Moïse connaissait à peine, sont par lui classés d’après l’identité de langage ; tel est le premier principe. Les fils de Cham, que Moïse connaissait mieux, sont classés d’après la ressemblance physique ; deuxième principe. Quant aux fils de Sem, que Moïse connaissait fort bien, M. Lenormant ne dit point d’après quel rapport ils avaient été classés. Il y avait bien entre eux communauté de langage, mais ce langage étant aussi celui de quelques populations de la race de Cham, ne peut être considéré comme caractère distinctif.

À ces deux principes, en ajoutant un troisième qui consiste à établir la synonymie entre les noms orientaux et les dénominations