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en faveur de la bonne cause, je ne puis me refuser à reconnaître dans quelle situation délicate se trouvait placé le général anglais. Une intervention quelconque dans la politique adoptée par le roi de France eût été contraire à la règle que s’étaient imposée les alliés, de laisser à Louis XVIII une indépendance complète en matière de politique intérieure.

La discipline que Wellington sut alors maintenir dans notre armée, est ou doit être un de ses plus beaux titres aux yeux de l’opinion publique. Il s’est élevé récemment, à ce sujet, une discussion sérieuse. On sait que le duc de Wellington se soucie peu d’introduire des réformes dans notre administration militaire et veut conserver intact l’ancien système, y compris les coups de fouet. La chambre des communes ayant institué un comité pour l’examen de cette question, le duc de Wellington y a été entendu, et ses réponses aux diverses demandes qui lui furent adressées ont été publiées fort au long. Dans le cours de cet exposé, il cita comme preuve des résultats de différens systèmes disciplinaires, le contraste que son armée présenta, en 1815, avec celle des Prussiens, dans leur marche sur Paris. « Mon armée, dit-il, trouva des subsistances et garda un ordre parfait, en marchant sur les traces des Prussiens, à travers un pays que ceux-ci venaient d’évacuer, parce qu’ils n’y trouvaient plus de quoi vivre, après l’avoir entièrement ravagé. » Cette assertion hardie a soulevé toute l’armée prussienne. Le duc de Wellington s’est vu accablé de répliques et de démentis sans nombre, accompagnés, pour la plupart, des plus aigres récriminations, et contre lui et contre son armée. Maintenant que la dispute est finie, on nous permettra peut-être de conclure que les faits se sont à peu près passés comme l’a dit le duc de Wellington, mais qu’ils ne prouvent pas grand’chose pour ou contre les systèmes respectifs de discipline militaire. L’armée anglaise était une force régulière, composée d’hommes d’élite, admirablement commandée, fort bien entretenue et approvisionnée par son gouvernement. L’armée prussienne était, au contraire, bien plutôt une espèce de levée en masse, organisée à demi, exaspérée par une ardente soif de vengeance, et poussée par le besoin à tous les désordres dont on l’accuse.

À son retour de France, le duc de Wellington accepta la place de grand-maître ou directeur-général de l’artillerie (master general of the ordnance), sous le ministère de lord Liverpool. Mais, quoique faisant partie du cabinet, il laissa passer quelques années avant de s’occuper des affaires intérieures du pays. En 1822, quand M.  Can-