Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/311

Cette page a été validée par deux contributeurs.
307
DES ÉTUDES HISTORIQUES DANS LE NORD.

Ce qu’on appelle Thingsted est une enceinte de pierres grossièrement taillées. C’est là que le peuple s’assemblait pour délibérer sur ses intérêts. C’est là qu’on proclamait le cri de guerre ; c’est là qu’on jugeait les procès ; c’était là aussi le lieu réservé pour les duels sanglans. Dans le district d’Arrhuns, on voit encore une de ces enceintes formées par sept grandes pierres. La tradition populaire dit qu’il y avait là jadis sept hommes qui furent changés en pierres pour avoir prêté un faux serment.

Les autels servant aux sacrifices se composaient d’une large pierre aplatie à sa surface, élevée à quelques pieds du sol et posée sur sept autres pierres taillées en pointe. Il existe, près de Skalstrup, un autel qui a trente pieds de long. On dit que c’était la pierre d’holocauste des rois de Leire. Ils faisaient là un sacrifice tous les ans, tous les trois ans, tous les neuf ans. Celui-ci était le plus atroce et le plus solennel. On immolait alors neuf garçons, neuf filles, neuf chevaux, neuf chiens, neuf coqs.

Le Steenkammer (salle de pierre) est une espèce de grotte élevée à quelques pieds du sol, et formée par une quantité de pierres taillées régulièrement, serrées l’une contre l’autre, et recouvertes de pierres plus larges. Du côté de l’est, la grotte est ouverte, et une pierre enfoncée dans le sol sert de seuil. On pense que ces steenkammer étaient réservées aux cérémonies mystérieuses. Un prêtre danois, M. Freglesang, dit qu’elles ressemblent beaucoup aux sanctuaires d’idoles, aux sanctuaires grossiers, mais imposans, qu’il a vus dans l’Inde.

Mais, de tous ces monumens, les plus curieux à étudier sont les collines tumulaires et les grottes souterraines, qui servaient de tombeau quelquefois à toute une famille, quelquefois à une peuplade entière. Dans la Seelande, on voit encore une de ces collines, qui a plus de deux cents pieds de long. Ailleurs, on trouve assez souvent trois tertres de gazon réunis l’un à l’autre. Le premier servait peut-être de sépulture au guerrier ; autour de lui on ensevelissait sa famille et ses compagnons d’armes.

« Les païens nos ancêtres avaient, dit Thorlacius, trois espèces de tombeaux : Haugr, Kuml, Dys. Le premier est spacieux, élevé et construit avec soin : au dehors, il est recouvert de gazon ; au dedans, on trouve une caisse de pierre (steenkiste) de forme carrée, mais plus longue que large. C’est là qu’on déposait ou les os du mort, après qu’il avait été brûlé, ou l’urne dans laquelle on recueillait ses cendres. Quelquefois aussi on ne brûlait pas les morts ; on les enterrait là assis sur une pierre en forme de vaisseau ou en forme de chaise, comme s’ils devaient encore naviguer à travers l’Océan ou présider aux banquets. Ces tombeaux étaient réservés aux hommes riches et puissans, et des pierres élevées à leur sommité, parfois des inscriptions runiques, les signalaient à l’attention des passans.

« Le second, le Kuml, moins large, moins apparent, mais également couvert de gazon, était le tombeau des paysans.

« Le troisième était réservé aux esclaves, aux malfaiteurs, aux prisonniers