Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/214

Cette page a été validée par deux contributeurs.
210
REVUE DES DEUX MONDES.

Sa tâche fut pénible ; elle t’aimait peut-être.
Mais le destin voulait qu’elle brisât ton cœur ;
Elle savait la vie et te l’a fait connaître,
Une autre a recueilli le fruit de ta douleur.
Plains-la ! son triste amour a passé comme un songe ;
Elle a vu ta blessure et n’a pu la fermer.
Dans ses larmes, crois-moi, tout n’était pas mensonge.
Quand tout l’aurait été, plains-la ! tu sais aimer.

LE POÈTE.

Tu dis vrai ; la haine est impie,
Et c’est un frisson plein d’horreur
Quand cette vipère assoupie
Se déroule dans notre cœur.
Écoute-moi donc, ô déesse,
Et sois témoin de mon serment :
Par les yeux bleus de ma maîtresse
Et par l’azur du firmament ;
Par cette étincelle brillante
Qui de Vénus porte le nom,
Et comme une perle tremblante
Scintille au loin sur l’horizon ;
Par la grandeur de la nature.
Par la bonté du créateur ;
Par la clarté tranquille et pure
De l’astre cher au voyageur ;
Par les herbes de la prairie,
Par les forêts, par les prés verts ;
Par la puissance de la vie,
Par la sève de l’univers ;
Je te bannis de ma mémoire,
Reste d’un amour insensé.
Mystérieuse et sombre histoire
Qui dormiras dans le passé !
Et toi qui jadis d’une amie
Portas la forme et le doux nom,
L’instant suprême où je t’oublie
Doit être celui du pardon.
Pardonnons-nous, — je romps le charme