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fabrication du papier, des savons et de la verrerie, 440,000,000 ; les droits de timbre et l’enregistrement, 180,000,000 ; les postes 37,000,000. Le surplus du revenu est fourni par les taxes assises et par les domaines. Une autre espèce de contribution indirecte se compose des émolumens ou épices (fees) payés à divers titres aux officiers publics, taxe très onéreuse et d’un usage presque universel, mais qu’il est impossible d’évaluer.

Quand on recherche la différence de ce qui doit ou de ce qui peut être avec ce qui existe en matière de contribution, l’on est conduit à penser que le gouvernement anglais, quels que soient à cet égard les projets des hommes d’état, n’adoptera jamais le système de l’impôt direct. Sans revenir ici sur la disposition aristocratique du sol et des fortunes, nous pensons que la préférence donnée à l’impôt indirect dans le royaume-uni est la conséquence nécessaire du caractère des mœurs et de celui des institutions. Les Anglais veulent bien avoir un gouvernement, mais ne veulent pas en sentir la pression. Ils ne lui accordent une armée que pour l’employer au dehors, et à l’intérieur ils ne lui votent des subsides qu’à la condition de ne pas se trouver en contact avec les agens du fisc. Au moyen de l’impôt indirect, une classe de citoyens supporte seule la gêne et les restrictions, pour en délivrer le public ; tout se passe entre les collecteurs et un certain nombre de fabricans et de commerçans. Ceux-ci vendront l’impôt avec leurs marchandises, et le consommateur restera libre d’étendre ou de réduire sa part de contribution, suivant la mesure dans laquelle il satisfera ses propres besoins. C’est une partie de la liberté pour l’habitant de la Grande-Bretagne, de n’être taxé ni dans sa personne, ni dans sa propriété. Il se trouve à l’aise quand les produits seuls sont imposés, et contribue plus volontiers à l’impôt quand il est maître de n’en prendre que ce qu’il lui plaît. Aucune taxe n’est plus impopulaire chez nos voisins que celle des fenêtres, bien qu’il n’y en ait pas de plus légère, ni de plus modérée.

Mais, si la forme de l’impôt indirect est assortie au caractère du peuple anglais, nous pensons qu’elle doit inévitablement se simplifier. Les États-Unis d’Amérique nous fournissent un exemple à la fois et un indice de la révolution financière qui s’accomplira un peu plus tard de ce côté de l’Océan ; le seul impôt réel établi au profit de l’état, chez les Anglo-Américains, consiste dans un système de douanes qui a pour but, non pas de protéger telle ou telle industrie indigène, mais seulement de fournir, au moyen de droits modiques, d’abondans revenus au Trésor.