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ORGANISATION FINANCIÈRE DE LA GRANDE-BRETAGNE.

Chez nous, le crédit public est entièrement du domaine administratif. C’est du Trésor que part la circulation, et c’est là qu’elle aboutit. Le Trésor, au moyen des quatre-vingt-six receveurs-généraux et des trois cent soixante receveurs d’arrondissement, fait les fonctions de banquier universel ; il absorbe les capitaux de la caisse des dépôts et consignations, ainsi que les fonds des caisses d’épargne, et devient une sorte de caissier gratuit pour tous les citoyens. Le taux auquel il emprunte sert de régulateur à l’intérêt de l’argent, la prime de la dette flottante agissant sur les capitaux mobiles, et la prime de la dette fondée, sur les capitaux immobilisés. Les bons du Trésor et les rentes sur l’état sont, en France, l’étalon (standard) de la valeur.

Il n’en est pas de même chez nos voisins. Dans leur édifice financier, le Trésor ne figure pas la clé de la voûte ; son rôle est secondaire et dépendant : la Banque le domine à une grande hauteur. C’est la Banque qui fait les avances de la dette flottante, et qui fixe, par conséquent, l’intérêt pour les bons de l’Échiquier ; c’est la Banque qui déclare, en élevant ou en abaissant le taux de l’escompte, la prime commerciale des capitaux ; c’est la Banque aussi qui, en donnant à ses billets la valeur de l’or, tient le change en faveur de l’Angleterre par rapport à tous les autres peuples chez qui le pair s’évalue au cours de l’argent.

Autant il y a de simplicité, d’unité, de puissance et de grandeur dans le mécanisme de la Banque, autant on découvre d’incohérence, de confusion et de rouages usés ou inutiles dans l’organisation de l’Échiquier. L’administration du revenu public a fait la force de l’Angleterre tant que les autres états de l’Europe ne connaissaient que de nom les garanties du système représentatif ; seule, elle avait une balance régulière de recettes et de dépenses, quand le désordre existait partout ailleurs. Mais elle s’est laissé devancer de bien loin, et va maintenant chercher ses modèles au dehors. Tandis que le système des banques, dans la Grande-Bretagne, semble être le dernier mot de l’économie politique, l’enfance de la science est lisiblement écrite dans son système d’impôt et d’administration.

Nous poursuivrons ce contraste en nous référant, pour les détails, au savant et consciencieux ouvrage que vient de publier M. Bailly sur les finances du royaume-uni[1].

  1. Exposé de l’administration générale et locale des finances du royaume-uni de la Grande-Bretagne et de l’Irlande.