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D’après sa manière de concevoir le pouvoir, l’école doctrinaire était appelée à s’associer le centre droit. Là gisait tout le secret, tout l’avenir de sa politique. Elle avait prêché, sous la restauration, soutenue par la grande propriété et les vieux souvenirs, l’alliance avec les forces nouvelles sorties de la révolution et du développement de la richesse publique ; très conséquente en ceci, elle prêcha, sous la révolution de 1830, l’alliance de la royauté nouvelle avec le parti essentiellement royaliste et conservateur.

Le succès d’une telle combinaison était impossible dans la chambre. La partie doctrinaire du cabinet ne la tenta pas ; mais elle laissa percer qu’on songeait à la tenter au dehors, et c’est contre cette vague inquiétude, suscitée au sein des intérêts parlementaires, qu’elle s’est brisée par deux fois, alors qu’elle semblait ne tomber que par l’effet d’une intrigue.

Nous avons exposé ailleurs notre pensée sur cette fraction honorable, mais peu nombreuse, de la société française, dont il n’appartenait qu’à la restauration d’utiliser le patronage local et le sincère dévouement. Le centre droit était pour elle la seule base possible de gouvernement, le seul pivot d’une évolution vers les classes plus nombreuses. Mais ses membres, qui sont bien moins un parti qu’une réunion désormais brisée d’individualités remarquables, ces hommes dont les louables intentions échouèrent constamment, ou contre la violence de leur propre parti, ou contre les exigences du parti contraire, lors même qu’ils étaient en communauté de croyances avec le pouvoir, seraient-ils désormais en mesure de prêter à un ministère quelconque un concours de quelque utilité ? Certainement non. En admettant qu’ils passassent jamais d’une neutralité, depuis long-temps acquise, à une association plus étroite, ne prépareraient-ils pas au pouvoir bien plus d’obstacles qu’ils ne lui donneraient de facilités ? Sans lui concilier la droite qui taxerait sa modération d’apostasie, le centre droit ne serait-il pas surveillé d’un œil inquiet par tous les intérêts élevés autour de la monarchie nouvelle ? La résurrection sérieuse d’un tel parti, au sein de la chambre élective et du corps électoral, était une impossibilité, quoique cette espérance fût devenue fondamentale au sein d’une école qui possède, à un degré souvent si remarquable, la pénétration politique.

Lorsqu’on reproche amèrement aux doctrinaires d’être des hommes de restauration, cela est faux, si l’on prend cette assertion au pied de la lettre ; cela est vrai sans nul doute, si l’on entend signaler une tendance. Le malheur de cette école, c’est d’avoir été écartée du