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REVUE. — CHRONIQUE.

pareil ministère existent dans la chambre des communes ou dans le pays. Le parti Stanley s’est absorbé dans celui de sir Robert Peel, et il est réduit à deux ou trois hommes, ce qui forcerait la reine Victoria de rétrograder brusquement jusqu’aux conservateurs. Au reste, c’est un exemple donné par une portion du pays lui-même ; car, entre autres particularités de ces dernières élections, on ne voit pas que les radicaux, qui ont essuyé plusieurs échecs, aient été remplacés par des réformistes modérés. Non : ce sont des tories, de purs tories qu’on a nommés à leur place, et nulle part le ministère n’a osé mettre en concurrence avec ceux des radicaux qui le gênaient le plus, comme M. Roebuck, un whig de sa propre couleur. Aussi les tories sont-ils triomphans, et sir Robert Peel a eu tort de ne pas désavouer plus vivement le roi de Hanovre, car c’est son fameux décret du 5 juillet qui leur enlève la majorité. Ce décret a donné aux réformistes une grande force, et ils en ont usé sans ménagement, comme aussi du nom de la jeune reine, et de l’appui qu’elle accorde à son ministère. Jamais, en France, on ne ferait intervenir le nom du souverain, dans les élections, avec autant d’éclat ; jamais un parti tout entier n’oserait l’identifier aussi complètement avec un cabinet dont les plus simples lois du régime parlementaire pourraient le contraindre à se séparer.

Le corps diplomatique est en ce moment fort incomplet à Paris. MM. d’Appony et de Pahlen sont en congé ; M. de Lowenhielm, ministre de Suède, est à Stockholm, où il refuse, dit-on, le portefeuille des affaires étrangères, laissé vacant par la mort de M. de Wetterstedt. M. de Werther est allé recueillir à Berlin le brillant héritage de M. Ancillon, et son successeur à Paris n’est pas encore arrivé. Mais le choix de ce successeur est fait. C’est M. d’Arnim, qui exerçait en dernier lieu les fonctions de ministre de Prusse à Bruxelles.

M. de Werther, qui n’a laissé à Paris que de bons souvenirs, sait mieux que personne par quelles qualités, par quelle modération de caractère, et par quelle sagesse d’opinion il y avait réussi, ce qu’il faut, en un mot, pour répondre à la parfaite intelligence qui règne entre les deux cours. Il est fort à présumer que le choix de M. d’Arnim n’aura pas été fait à la légère, et que les instructions, non moins que l’esprit du nouvel envoyé, lui traceront une ligne de conduite dont le gouvernement n’ait qu’à se féliciter. Nous n’aurions pas exprimé cette espérance, mêlée d’une ombre de doute, si nous n’avions eu le vague souvenir que M. d’Arnim n’a pas toujours eu à Bruxelles l’attitude que nous désirons lui voir prendre à Paris. Il est vrai qu’un changement de théâtre peut amener un changement de rôle, que l’action du temps modifie chaque jour, en Europe, bien des répugnances, efface bien des préventions, crée de nouveaux intérêts, et avec eux la nécessité de nouveaux rapports. Si M. d’Arnim avait eu besoin d’éprouver cette salutaire action du temps sur les esprits, nous sommes persuadés que le sien n’y aurait pas échappé, et qu’il arrive ici avec son éducation toute faite à cet égard.


— La séance annuelle de l’Académie française, tenue le 9 août, a rassemblé, comme d’ordinaire, une société nombreuse et choisie. Nous concevons cet empressement. S’il nous était permis d’emprunter un mot au vocabulaire théâtral, nous dirions qu’aujourd’hui il y a de l’effet dans les représentations académiques. Les assistans n’y apportent jamais qu’un air de fête : ceux qui tiennent aux lauréats par des liens de famille ou d’affection, naturelle-