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pénétré dans la familiarité du fondateur du Lycée, vous pouvez vous écrier avec un autre philosophe, mais dont la sagesse s’est cachée sous une tendre et harmonieuse poésie :

Felix qui potuit rerum cognoscere causas,
Atque metus omnes et inexorabile fatum
Subjecit pedibus, strepitumque Acherontis avari
.

Depuis quelque temps on a recommencé, en France, à s’occuper d’Aristote, mais avec l’impartialité scientifique qui convient à notre époque. Jamais nom n’a été plus invoqué pour l’apothéose ou pour l’invective. Les Arabes, le moyen-âge, les attaques de Ramus du Collége de France, la révolution accomplie par Descartes, les arrêts du parlement de Paris, les divertissantes facéties de Molière, voilà, ce nous semble, de la gloire. Aujourd’hui Aristote est encore l’objet de l’attention de l’esprit humain. En Allemagne, l’érudition et la philosophie systématique l’exploitent abondamment. En France, plusieurs travaux ont déjà paru ou vont paraître, qui nous donneront une image fidèle des doctrines péripatéticiennes. M. Cousin, qui, parmi nous, a relevé avec tant d’éclat l’histoire de la philosophie, a eu l’heureuse idée d’appliquer à l’étude d’Aristote les ressources et les moyens académiques dont il dispose. En 1833, il a fait mettre au concours, devant l’Académie des sciences morales et politiques, l’examen critique de la Métaphysique d’Aristote. Ce concours a produit deux ouvrages remarquables, l’un de M. Michelet, de Berlin, l’autre, qui a obtenu le premier prix, est le début heureux de M. Ravaisson, qui avait remporté le prix d’honneur de philosophie au concours général. Le Mémoire du jeune lauréat paraîtra dans quelques mois. En 1835, M. Cousin a fait ouvrir un second concours sur l’Organum d’Aristote, et la couronne a été décernée à M. Barthélemy Saint-Hilaire, qui fera paraître son livre vers la fin de l’automne. Avant d’arriver à la Politique, n’oublions pas de mentionner le rapport lumineux de M. Cousin, sur le concours de 1833, la traduction qu’il a faite du premier livre de la Métaphysique, et celle qu’il prépare du douzième.

Mais Aristote a enflammé parmi nous l’ambition d’un homme qui se propose d’élever au fondateur du péripatétisme le monument d’une traduction complète ; cet ambitieux est M. Barthélemy Saint-Hilaire, qui entame aujourd’hui son œuvre par la Politique, et que l’Institut, il y a quelques semaines, a couronné pour son Mémoire sur l’Orga-