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vernement est sans bornes et très solidement établie, et même, s’il faut en croire les impressions de quelques observateurs exercés, on s’accoutume à l’idée de voir retourner encore une fois lord Durham à son poste d’ambassadeur près la cour de Russie.

L’expédition de don Carlos n’est pas heureuse. Non-seulement il n’a pu entrer dans Valence ; mais après l’avoir menacée pendant quelques jours, il a été battu non loin de ses murs par le général Oraa, qui lui a tué beaucoup de monde et fait un grand nombre de prisonniers. Un chef de bandes que le prétendant avait laissé en arrière, s’est vu aussi obligé de lever le siége de Castellon de la Plana, courageusement défendue par les habitans et une faible garnison. Depuis, des manœuvres encore bien confuses ont paru indiquer, de la part de ce prince, l’intention de repasser l’Èbre, pour retourner en Navarre par l’Aragon. Cependant une autre expédition carliste, forte de 6,000 hommes au plus, est entrée en Castille, soit pour se réunir aux forces que don Carlos avait laissées du côté de Sarragosse et en avant de Cantavieja, tandis qu’il se dirigeait de ce dernier point sur Valence, soit pour tenter une diversion par le nord. Jusqu’ici les généraux de la reine semblent ne pas s’en être occupés.

On a peut-être exagéré l’importance de l’échec essuyé par don Carlos à Chiva. Nous ne le croyons pas capable d’aller à Madrid ; mais pour nous rassurer pleinement et pour proclamer que son expédition est manquée, nous attendrons une victoire plus décisive des troupes constitutionnelles. Au reste, il est permis d’en concevoir l’espérance ; elles sont supérieures en nombre ; leur organisation est meilleure, elles ont de l’artillerie, et appuient leurs mouvemens sur les places fortes du pays, dont le prétendant ne peut se rendre maître. Quoi qu’il en soit, et même sans victoire décisive, les carlistes et leurs partisans en Europe ne doivent plus se croire aussi sûrs du triomphe qu’il y a un mois. Les entrevues de Tœplitz finiront encore sans qu’un évènement assez grave en faveur de don Carlos ait provoqué de résolution définitive à son avantage, de la part des gouvernemens qui font des vœux pour sa cause. Ces gouvernemens prennent trop leurs désirs pour des réalités. Le parti de la reine est plus faible que celui de don Carlos n’est fort : voilà ce qu’ils ne voient pas bien, quoique cette vérité ressorte clairement de tout ce qui se passe ; et si la lenteur, l’incertitude ou la nullité des résultats les étonnent et les irritent sans cesse, c’est qu’ils ne comprennent ni le pays qui en est le théâtre, ni les hommes qui en sont les instrumens, ni la situation réelle des deux partis en lutte.

La nouvelle constitution de la monarchie espagnole sera prochainement appliquée dans ce qu’elle a de plus important, la composition du corps législatif. Les cortès, divisées en deux chambres, sont convoquées pour le 19 novembre, et déjà on commence à s’occuper des élections. Toujours la même incertitude sur le fameux emprunt et le traité de commerce avec l’Angleterre, qui serait la condition de la garantie de cette puissance.

Une insurrection militaire en faveur de la charte de don Pedro a éclaté