Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/341

Cette page a été validée par deux contributeurs.



SUR
LE JUGEMENT DERNIER.

Il y a deux mois environ que le Jugement dernier a été offert aux curieux. Dans cet espace de temps, les journaux ont trouvé bien peu de place pour parler de l’impression de ce chef-d’œuvre. Encore quelques jours, il n’aura plus le moindre retentissement dans les esprits, et l’oubli s’avance déjà pour le saisir. Il est donc bien tard pour ajouter quelques idées au petit nombre de celles qui ont été soulevées à cette occasion ; et pourtant, quel champ plus vaste ouvert à la critique, à la réflexion, à l’enthousiasme ! Un homme d’un talent supérieur consacre plusieurs années à la reproduction aussi exacte que possible de l’ouvrage le plus colossal que les arts aient produit chez les modernes ; ni le temps, ni la patience ne sont épargnés pour conduire et achever une si respectable entreprise ; le gouvernement fait les frais du tableau et lui garde une place convenable dans une nouvelle construction élevée à la gloire et au culte des arts : tout concourait pour ménager au public de nobles plaisirs, et le public est resté froid, et les critiques ne se sont pas émus ou ont à peine tourné leurs regards vers cette nouveauté, la plus vraiment neuve, cependant, et la plus inattendue.

À qui faut-il s’en prendre de cette indifférence coupable ? Doit-on se dire que les beaux ouvrages ne sont pas faits pour le public et ne sont pas appréciés par lui, et qu’il ne garde ses admirations privilégiées que pour de futiles objets ? Serait-ce qu’il se sent pour