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LES VOIX INTÉRIEURES.

par l’auteur pour exprimer la forme de ses livres et de ses porcelaines, et dont le plus grand défaut est d’être absolument inintelligibles pour les oiseaux envolés. Mais je crois devoir insister sur l’exagération et la maladresse des louanges adressées à M. Méry. Quel que soit le mérite de la Villéliade, assurément ce n’est pas un titre suffisant pour entrer dans la famille d’Homère ; car ce poème, si vanté sous la restauration, n’est qu’une imitation ingénieuse de Boileau et de Delille, qui rappelle tour à tour les plaisanteries du Lutrin et les périphrases descriptives de l’Imagination. Peut-être M. Hugo a-t-il voulu remercier M. Méry d’avoir quitté Boileau et Delille pour les strophes dorées des Orientales. Nous inclinons à le croire ; mais si le disciple de M. Hugo est fils d’Homère, Homère et M. Hugo ne seront plus qu’une seule et même personne. En supprimant la description de quelques joujoux, et en rayant M. Méry de la liste des Homérides, je suis sûr que M. Hugo ne ramènerait pas moins sûrement les oiseaux envolés, et qu’il plairait à tous les hommes de goût.

Tentanda via est se rapporte, comme la pièce précédente, à la vie de famille. Le poète, pour calmer l’inquiétude de sa compagne qui s’effraie des longues rêveries de son enfant, essaie de lire dans l’avenir, et déroule devant la mère éplorée toutes les gloires réservées à son fils. Assurément c’est là un noble orgueil, une noble confiance, un espoir légitime dont la raison peut sourire, mais qu’elle ne condamne pas. Que M. Hugo voie dans son fils un héritier de Mozart ou de Michel-Ange, de Raphaël ou de Palladio, il n’y a là rien qui nous étonne, et souvent il est sage de se consoler des jours mauvais qu’on a soi-même parcourus en rêvant pour ceux qu’on aime des jours meilleurs. Un rhéteur chicanerait M. Hugo sur l’alliance du bonheur et de la gloire, mais il me semble inutile de réveiller cette question éternelle. D’ailleurs, lorsqu’il s’agit de M. Hugo, les questions ne manquent pas. J’ai peine à comprendre, par exemple, pourquoi espérant que son fils prendra l’Europe pour échiquier, il rapproche François Ier de Napoléon. Je concevrais très bien qu’il mît en regard l’empereur du viiie siècle et l’empereur du xixe ; mais, à moins de chercher dans les guerres d’Italie le lien mystérieux qui rattache François Ier à Napoléon, je ne devine pas la parenté de ces deux noms. Il est permis de reprocher à Napoléon l’ignorance des limites où devait s’arrêter sa volonté ; mais s’il lui est arrivé de prendre quelquefois l’audace pour le courage, il n’a jamais eu le goût des aventures. Or, François Ier, comme Charles VIII et Louis XII, courait en Italie chercher des aventures. Entre le prisonnier de