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de l’époque, pourvu que le système de la monarchie représentative y fût consacré par toutes les garanties et les institutions qui sont indispensables à l’existence de cette forme de gouvernement. L’ensemble du projet fut adopté, après six jours de discussion, à la majorité de cent vingt-quatre voix contre trente-cinq, et plusieurs autres divisions ont reproduit ce chiffre de trente-cinq, élevé en certains cas jusqu’à quarante et quarante-un, comme représentant une opposition qui désapprouve et détruirait, à la première occasion favorable, l’œuvre tout entière si péniblement élaborée par les cortès actuelles, sous l’influence du ministère Calatrava.

M. Olozaga, rapporteur de la commission, est l’homme qui a fait la plus grande figure dans la discussion des réformes constitutionnelles, et c’est, à tout prendre, le talent le plus élevé dont la tribune espagnole puisse s’enorgueillir. Les cortès ont sans doute quelques autres orateurs et plusieurs spécialités en diverses branches de la science législative ; mais ceux qui pourraient le disputer à M. Olozaga ne sont point assez de leur temps : les uns en sont opiniâtrement restés à la constitution de 1812, moulée sur les idées françaises de 1791 ; les autres n’ont que des passions révolutionnaires, et ne sont que des hommes de lutte, avec des lambeaux de terrorisme systématisé pour toute doctrine gouvernementale et pour toute faculté d’organisation politique. C’est l’influence de M. Olozaga qui a donné à la nouvelle constitution espagnole son caractère pratique, qui a fait rendre au souverain son importance dans l’état, qui a débarrassé la machine du gouvernement de rouages inutiles ou dangereux, comme le conseil d’état de la constitution de Cadix et la députation permanente des cortès ; qui a fait éviter la tendance des législateurs de 1791 et de 1812 à tout régler géométriquement, et qui enfin a mis une nation monarchique en possession d’une charte où l’élément monarchique n’est plus entièrement sacrifié au principe électif.

Les articles qui concernent le sénat ont donné lieu à des discussions multipliées et très vives. Ils forment, dans la loi fondamentale, une partie tout-à-fait neuve, puisque la constitution de 1812 n’admettait qu’une seule chambre.

La commission avait proposé de conférer au souverain le droit de nommer les sénateurs, sur une triple liste de candidats, émanant des mêmes électeurs que la nomination directe des députés, et elle demandait en même temps que les fonctions de sénateur fussent à vie. Plusieurs orateurs, frappés de la contradiction qui existe entre