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REVUE DES DEUX MONDES.

Du sein de l’Océan sortir humide et blond,
Sans pouvoir m’élancer vers lui comme l’aiglon.
Je sentirais l’odeur que la première pluie
Fait sortir en avril de l’herbe épanouie,
Et je ne pourrais plus, dans la rosée en pleurs,
Aller, comme l’oiseau, baigner ma plume ardente.
Non, le soleil, l’espace et la terre, et les fleurs !
Je vivrai, comme Dieu m’a faite, indépendante,
En attendant des jours prospères et meilleurs.


LA MUSIQUE.


Eh bien ! suis ton destin, malheureuse insensée,
Et va sur quelque pic, désert, aride et nu,
Mourir honteusement, confuse et délaissée,
Seule avec ton orgueil, ta dernière vertu.


LA POÉSIE.


Mourir, mourir ! Du sein du printemps qui se lève,
De la source où le ciel se mire tout en feu,
De la tige nouvelle où bouillonne la sève,
Et de la conscience, et du monde, et de Dieu,
Quelque chose qui tinte, et qui vibre, et qui flotte,
Me dit, avec un bruit de végétation
Plus sonore cent fois que ta plus belle note,
Que je ne mourrai pas dans la création.


LA MUSIQUE.


Le soleil s’est plongé dans la mer empourprée,
Le fleuve et la moisson viennent de tressaillir ;
L’Océan ralentit sa plainte mesurée ;
La nature s’endort, — c’est l’heure du plaisir.
Le douteux crépuscule au ciel habite encore,
Et déjà sur le seuil de mon temple sonore,