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rêté exclusivement aux anciennes traditions scandinaves. Il a écrit une tragédie sur Charlemagne, une autre sur un chevalier allemand, Hugo de Rheinberg, une autre sur la mort de Corrége, et sur deux princes de Danemark, Erik et Abel, et sur Tordenskiold, cet homme d’audace et de génie, qui du rang de simple matelot, s’éleva en peu de temps, au grade d’amiral et fut tué à trente-cinq ans dans un duel.

Ces tragédies sont parfois un peu longues et un peu froides. Le public en France aurait de la peine à admettre tant de conversations sentencieuses, tant de scènes élégamment tracées, mais dépourvues d’action. Il lui faut, dans un drame, du mouvement et de la vie. Les hommes du Nord sont d’une autre trempe. Ils aiment ces longs discours qui ressemblent à des dissertations de professeur. Ils vont au théâtre comme à un cours d’esthétique, et peu leur importe quand le drame arrive, et comment il arrive, pourvu qu’ils y trouvent une portion suffisante de maximes philosophiques et de poésie. Mais les pièces d’Œhlenschlœger sont écrites dans un style simple, vrai, montant sans effort du ton habituel de la conversation à la période majestueuse : Œhlenschlœger a un grand art pour disposer les diverses péripéties de ses drames, pour faire mouvoir ses personnages, et il entremêle habilement des scènes de bonne comédie à des situations tragiques. Bien entendu qu’il est de la nouvelle école et qu’il se soucie fort peu des trois unités.

Ses poèmes sont devenus populaires comme ses tragédies. Celui qui porte le titre de Helge est une histoire empruntée aux sagas, l’histoire d’une nymphe des eaux, d’un guerrier, d’une femme qui le trompe, et d’une jeune fille qu’il épouse sans savoir que c’est sa fille. Le poème se compose d’une suite de chants irréguliers, tantôt lyriques, tantôt épiques. Il y a là plusieurs tableaux d’une grace charmante, et des scènes de voyage, d’amour, de douleur, racontées avec un rare talent. Cette œuvre d’Œhlenschlœger est sans contredit l’une de ses meilleures. Beaucoup de personnes la préfèrent à la Frithiofs-saga de Tegner. Mais les Latins le disaient avant nous : Habent sua fata libelli. La Frithiofs-saga a été traduite dans toutes les langues, et Helge n’est encore connue qu’en Danemark.

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