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quement pour rappeler l’idée du dieu Horus, mais phonétiquement pour désigner l’ame. Les noms de l’épervier et de l’ame sonnant à l’oreille de la même manière, ces deux choses, quoique fort différentes, étant homonymes, dès que la figure de l’épervier se trouvait employée pour rappeler seulement le nom de cet oiseau, on sent que de cet emploi pouvait résulter l’expression de l’idée ame.

Ce dernier mode d’expression a été signalé par d’Origny, dans ses Recherches sur l’Égypte ancienne, par Zoéga, dans son Traité sur les obélisques, comme devant former, si réellement on en a fait usage, un obstacle presque insurmontable à l’interprétation d’un grand nombre de tableaux hiéroglyphiques. Toute langue s’altère par le laps des siècles ; il est à croire que la langue égyptienne n’aura pu traverser des milliers d’années sans éprouver des changemens, des modifications peut-être assez grandes. Or dans un pareil travail, les homonymies primitives s’effacent et disparaissent, et l’on en voit apparaître de nouvelles. La forme des objets, leurs qualités naturelles ne changent pas ; aussi peut-on regarder comme offrant les mêmes résultats, à deux époques fort distantes l’une de l’autre, des modes d’expression fondés sur cette forme, sur ces qualités ; mais les noms changent avec le temps, si bien que telle figure qui, à cause de son nom, aura pu rappeler telle idée à certaine époque, pourra plus tard, par suite des changemens que ce nom aura subis, rappeler toute autre idée que celle qui était dans l’intention de l’écrivain.

J’aurais pu faire, sur le quatrième mode, quelques réflexions analogues à celles que je viens de présenter au sujet du cinquième ; en effet, des rapports établis conventionnellement entre certaines idées peuvent fort bien varier avec le temps, et partant, le sens d’une figure, fondé sur de semblables rapports, peut fort bien disparaître derrière des conventions nouvelles. Je ne veux point assurément déclarer insoluble le problème des écritures égyptiennes ; bien loin de là, je crois que nous sommes sur la voie de la solution. Mais je veux faire comprendre comment, après avoir énuméré les divers modes d’expression que nous venons de citer, Zoéga pouvait terminer en disant : « Quand on songe à toutes ces expressions énigmatiques qui dans l’écriture hiéroglyphique des Égyptiens ont été attachées soit à la figure des objets, soit au nom