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REVUE DES DEUX MONDES.

CHAVIGNY

Certainement ; vous en voyez la preuve.

MADAME DE LÉRY

Pas tant ; vous avez l’air furieux.

CHAVIGNY

Moi ! par exemple ! pas le moins du monde.

MADAME DE LÉRY

Vous ne tenez pas sur votre fauteuil. Je vous croyais un tout autre homme, je l’avoue, et, pour parler sérieusement, je n’aurais pas prêté ma voiture à Mathilde, si j’avais su ce qui en est.

CHAVIGNY

Mais je vous assure que je le trouve tout simple, et je vous remercie de l’avoir fait.

MADAME DE LÉRY

Non, non, vous ne me remerciez pas ; je vous assure, moi, que vous êtes fâché. À vous dire vrai, je crois que si elle est sortie, c’était un peu pour vous rejoindre.

CHAVIGNY

J’aime beaucoup cela ! Que ne m’accompagnait-elle ?

MADAME DE LÉRY

Hé ! oui, c’est ce que je lui ai dit. Mais voilà comme nous sommes, nous autres ; nous ne voulons pas, et puis nous voulons. Décidément, vous ne prenez pas de thé ?

CHAVIGNY

Non, il me fait mal.

MADAME DE LÉRY

Eh bien ! donnez-m’en.

CHAVIGNY

Plaît-il, madame ?

MADAME DE LÉRY

Donnez-m’en.

(Chavigny se lève et remplit une tasse, qu’il offre à Mme de Léry.)
MADAME DE LÉRY

C’est bon ; mettez ça là. Avons-nous un ministère ce soir ?

CHAVIGNY

Je n’en sais rien.

MADAME DE LÉRY

Ce sont de drôles d’auberges que ces ministères. On y entre et on en sort sans savoir pourquoi ; c’est une procession de marionnettes.