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de marins, et ces vaisseaux manquent de tout. L’administration de la marine est livrée à un désordre incroyable ; des abus monstrueux, un brigandage traditionnel dans les plus hautes sphères du gouvernement, dans les fonctions les plus importantes, dévorent la majeure partie des ressources consacrées à cette branche de service. Les Européens qui ont mission d’approfondir la situation des choses n’en croient pas leurs yeux, et les limites du possible, en fait de désordre administratif, reculent tous les jours devant leur esprit alarmé.

On nous reprochera peut-être, à nous qui sentons aussi bien que personne la nécessité de l’empire ottoman dans le système européen, on nous reprochera peut-être d’avoir chargé ce portrait. Nous ne l’avons ni flatté, ni chargé. Nous avons dit la vérité telle que nous la savons, et quand nous voyons les illusions que se font encore certains esprits sur la question d’Orient, nous pensons que c’est là le meilleur moyen de servir une cause qui n’en reste pas moins la plus juste, comme la cause de la paix et de l’humanité. C’est d’ailleurs l’explication nécessaire du système suivi, à quelques nuances près, à Constantinople, à Paris et à Londres, par les deux cabinets qui portent le plus vif intérêt à la conservation de l’empire ottoman, et à sa régénération, si elle est possible. Les deux puissances dont nous voulons parler ont maintenant une occasion nouvelle d’appliquer ce système dans leurs relations avec le divan, à propos d’une négociation encore imparfaitement connue du public, et dont il nous reste à rendre compte. Nous le ferons sur des renseignemens assez sûrs et avec des détails qui en compléteront l’histoire.

L’Europe n’a pas appris sans étonnement, il y a quelques mois, une révolution considérable qui s’est opérée à Constantinople en novembre 1836, dans le personnel de la haute administration de l’empire. Le vieux séraskier, Khosrew-Pacha, qui partageait avec

    qu’il demandait déjà quand Reschid-Pacha, général en chef de l’armée de Mésopotamie, n’ayant pu vivre en bonne intelligence avec lui, obtint de la Porte l’autorisation de lui faire la guerre. Revenduz, se troublant à l’idée de porter les armes contre le chef de sa religion, n’opposa qu’une faible résistance aux troupes de Reschid, et finit par se rendre. Mais après qu’il eut quitté le pays, le Kourdistan retomba dans l’anarchie d’où il l’avait tiré ; les forces ottomanes se trouvèrent impuissantes pour y maintenir l’ordre et l’autorité du sultan, et peut-être sera-t-il désormais très difficile pour Revenduz lui-même d’y reconquérir son ancien ascendant.