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LA PRESSE FRANÇAISE.

l’Europe, et particulièrement du Portugal. Dans les miniatures qui en font l’ornement, l’auteur croit retrouver la richesse d’invention, la pureté de style, en un mot les qualités éminentes que l’école du Pérugin appliqua plus tard à la peinture monumentale. À ce compte, les artistes en miniature seraient les véritables régénérateurs de l’art, car un chef-d’œuvre est également digne d’admiration, qu’il soit exécuté sur une feuille de parchemin ou sur un pan de muraille. M. de Santarem ajoute que la pratique de la miniature florissait en France à une époque où l’Italie n’en possédait pas même le nom, que les dessinateurs étrangers se formaient à l’école française, et que les rois de Portugal entretenaient à Paris des pensionnaires, pour exécuter les belles compositions qu’on admire encore aujourd’hui dans les manuscrits célèbres. Cette assertion d’un étranger, si honorable pour notre pays, appelle l’examen des artistes français.

Un ouvrage justement estimé, le Cours d’Antiquités monumentales, par M. de Caumont, s’est enrichi d’un cinquième volume. L’analyse archéologique, en grande faveur aujourd’hui, prouve matériellement que l’invention est prodigieusement rare, et que de tous temps le nom d’artiste a été usurpé par des ouvriers plus ou moins habiles dans l’emploi des théories particulières à l’époque, acceptées et pratiquées de confiance. L’indépendance de l’esprit, unie à ce degré de conviction qui entreprend de réaliser une conception nouvelle, c’est là un de ces phénomènes que l’histoire des arts n’a jamais montrés qu’à longs intervalles. Entre deux novateurs heureux se groupe instinctivement l’engeance des copistes : les différences légères que remarquaient les contemporains disparaissent à distance, de sorte que, pour nous, tous les ouvrages d’un siècle portent l’empreinte d’une même pensée. C’est ainsi qu’en étudiant les détails d’un monument dont les titres historiques sont perdus, on reconnaît à quelle époque et par quelle inspiration il a été construit, de même qu’on classe un végétal par l’inspection analytique de ses organes. Ce mode de nomenclature archéologique n’est pourtant pas infaillible. Il est assez ordinaire, par exemple, d’accorder trop d’importance à l’ornementation, qui, loin d’être un indice de l’époque et du style, doit naturellement présenter les caractères de la simplicité ou de la richesse, selon la générosité des fondateurs ou les ressources matérielles de la localité. Il serait plus prudent de ne s’en rapporter qu’aux dispositions générales, à l’inévitable relation entre le plan et la destination d’un édifice, c’est-à-dire qu’il faudrait tenir compte, avant tout, des modifications commandées par les croyances et les pratiques de chaque siècle. Après s’être un peu écarté de cette règle, en parlant de l’architecture religieuse, M. de Caumont y est revenu forcément dans son nouveau volume, qui traite de l’architecture civile et militaire, trop pauvre d’ornemens, trop défigu-