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nécessité qu’on puisse admettre en France) a été démontrée, les haines privées, les fureurs, heureusement impuissantes, de l’écume des partis, se sont attaquées à sa personne. C’est la lie du vase. Le calice révolutionnaire aura été vidé. Ceci passera, et le pays restera, avec les honnêtes gens, le pays qui est pour le trône d’où nous vient l’ordre, et d’où nous viendront aussi une prospérité stable et l’affaiblissement encore plus rapide des partis, si l’on continue, comme on fait aujourd’hui, de fermer l’oreille à des récriminations insensées et à des conseils funestes.

La guerre civile finie, grace à tous les hommes que nous avons nommés, et grace au roi d’abord ; le parti républicain réduit à se nier lui-même, pour ne pas être confondu avec de misérables assassins ; le parti légitimiste perdu dès qu’il se montre au jour, réduit à un esprit de mode aristocratique, vivant de riens, et toléré seulement dans la chambre grace à l’aménité d’un immense talent isolé, il se trouva que de tous ceux qui avaient concouru à cet état de choses, M. Guizot seul avait gardé l’épée au poing. Franchement, que combat aujourd’hui M. Guizot, resté seul de son système ? D’où vient que son humeur belliqueuse et exclusive a augmenté en raison inverse des dangers publics ? Comment ! on ne serait un homme de gouvernement qu’autant qu’on partagerait les idées sur le pouvoir qui se trouvent défendues par la Paix et par le Journal de Paris ! On n’aurait le droit de se dire monarchique qu’en adoptant, à l’égard de la royauté, les doctrines de M. de Maistre en ce qui est de Rome et du chef de l’église ! Un ministre n’échapperait à l’accusation de lâcheté, de faiblesse et de couardise, qu’en professant l’infaillibilité du pouvoir royal et sa propre infaillibilité, deux infaillibilités à qu’il arriverait souvent de se contredire, comme celles du pape et des conciles ! C’est à ce compte que M. Guizot est l’expression la plus nerveuse des idées monarchiques en France. C’est à ce compte que M. Thiers, qui a fait arrêter Mme la duchesse de Berri, est moins homme de résistance que M. Guizot, qui a relâché le prince Louis Bonaparte par l’entremise de M. de Gasparin ! M. Thiers, qui a enfermé la république sous les verroux du mont Saint-Michel, est moins un homme de gouvernement que M. de Rémusat, qui a vécu paisiblement, dans ces sept années d’angoisses, tout près du pouvoir et dans le pouvoir, mais à l’abri de l’irresponsabilité dont il s’est plu à couvrir sa vie politique et administrative ! M. de Montalivet, qui, étant ministre, escortait lui-même, à cheval, les ex-ministres de Charles X, et faisait respecter, au péril de ses jours, un arrêt de la cour des pairs, est un défenseur moins hardi du pouvoir que M. Duchâtel ! M. Molé, qui maintenait le principe de la non-intervention, et déclarait nettement qu’il ferait entrer une armée en Belgique si la Prusse y envoyait un bataillon, M. Molé n’a pas été aussi utile à la France, par sa décision, que l’a été, lors de la discussion de la loi des conseils de guerre, M. Jaubert, par ses menaces