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des droits politiques, toujours sujets à controverse, elles avaient le droit plus clair de l’humanité, qui prescrit de séparer des gens qui s’entr’égorgent. La France surtout, plus voisine des évènemens, la France, gênée dans son commerce, obligée au maintien d’une armée d’observation, appuyée d’ailleurs et excitée par l’Angleterre, pouvait aisément terminer la guerre de Navarre, et en chasser le prétendant qu’elle avait laissé traverser ses provinces. Si elle eût franchement et hautement exécuté le traité de la quadruple alliance, si elle eût repoussé les prétentions des cours du Nord, comme la restauration, en 1823, repoussa celles de l’Angleterre, il y a long-temps qu’elle aurait délivré l’Espagne de la guerre civile. Deux époques surtout ont été favorables pour une intervention armée. La première, lorsque don Carlos venait de traverser la France, échappant à toutes les polices qui s’y croisent et s’y surveillent, et que le maréchal Soult voulait qu’on lui courût sus, qu’on le fît rattraper par des gendarmes, comme un prisonnier qui a rompu son ban ; la seconde, presque tout récemment, lorsque le gouvernement espagnol demandait l’intervention à mains jointes, et que l’Angleterre conviait la France à l’accorder. À la première époque, l’insurrection carliste n’était pas forte encore ; à la seconde, elle était épuisée, harassée, et désespérait de la résistance. L’approche d’un corps français, portant le drapeau et les couleurs nationales, eût suffi pour la soumettre, car, ne cherchant, comme le disait son général, que le moyen de mettre bas les armes sans bassesse, elle le trouvait dans cet évènement. Il n’y avait pour elle nul déshonneur à rendre son épée à la France. Bien des hommes haut placés, et dont l’opinion est aussi puissante qu’elle est peu suspecte, sont restés convaincus que la légion étrangère seule et la légion britannique, si elles eussent été, non des corps de l’armée de Christine, mais les représentans armés et avoués de la France et de l’Angleterre, auraient suffi pour la pacification des provinces soulevées. On eût vu se répéter là ce qui s’était récemment passé en Portugal. Les miguélistes ne voulaient point non plus, en 1834, céder aux troupes constitutionnelles de don Pedro ; ils soutenaient la guerre. Mais quand une seule division espagnole commandée par Rodil, fut entrée sur le territoire portugais, les miguélistes se rendirent sans combat, et les deux prétendans furent expulsés à la fois de la Péninsule. C’est une