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LITTÉRATURE ORIENTALE.

Enfin une version sanscrite barbare, datant du XVe siècle, et dont l’auteur est un certain Nerioseng, faite de même, non sur le texte zend, mais sur la version pelvie.

Mais le plus utile auxiliaire de M. Burnouf, dans sa courageuse entreprise, a été incontestablement l’analogie, l’induction tirée de la comparaison des langues de la famille à laquelle le zend appartient, et en particulier du sanscrit. M. Burnouf est doué au plus haut degré de cette sagacité ingénieuse qui démêle les secrets de la formation intime des langues, et découvre les lois qui les régissent. Une science a été créée dans ce siècle, et a remplacé les spéculations arbitraires, conjecturales et souvent si ridicules de l’étymologie. À la fois anatomie et physiologie comparée des langues, cette science pénètre par l’analyse dans leur tissu, et détermine les conditions permanentes et les conditions variables de leur organisation. Pour elle, les langues sont des êtres vivans qui ont leurs formes propres, dont les variations accidentelles peuvent être ramenées à un type constant ; entre ces êtres qui naissent, se développent, se reproduisent et périssent d’après des lois fixes, sont des relations de parenté, dont on peut mesurer le degré. Chacun a sa physionomie, ses instincts, ses habitudes, ses antipathies, on oserait presque dire son caractère et ses mœurs ; de sorte qu’on peut pressentir ce que fera telle langue dans telle circonstance, quelle forme elle affectera, quel parti elle prendra, comme on le dirait d’un être vivant, d’une personne. L’étude des langues, ainsi envisagée, a tout l’intérêt de l’étude de l’organisation. Par sa méthode, sinon par son objet, elle se place parmi les sciences naturelles.

C’est le grand philologue allemand Jacob Grimm qui a créé cette science par son admirable analyse comparative des langues germaniques, à laquelle il a donné le titre modeste de Grammaire Allemande. Il a démontré rigoureusement l’unité fondamentale de tous ces idiomes, et a suivi à travers les temps, depuis le IVe siècle jusqu’à nos jours, l’histoire de leurs divers développemens.

Il a découvert les lois constantes de la permutation des lettres, suivant lesquelles tel idiome prend toujours telle lettre, là où un autre idiome la rejette et prend constamment la lettre correspondante.

De sorte qu’un radical germanique étant donné, on pourrait