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institutions nouvelles ont fait un bien infini. Tous les inspecteurs que j’ai rencontrés dans mon voyage m’ont assuré qu’elles avaient, pour ainsi dire, métamorphosé l’état d’instituteur, et donné aux jeunes maîtres un sentiment de la dignité de leur profession, et par là un ton et des manières qui avaient singulièrement profité aux écoles. Ainsi les faits, même en Hollande, sont de mon côté, et le problème est pour moi résolu. Il l’est, mais à deux conditions sans lesquelles je conviens que l’école normale est plus dangereuse qu’utile : 1o tout en donnant aux jeunes maîtres une culture plus élevée que celle qu’ils auraient pu rencontrer dans une école de pauvres, l’école normale doit garder un caractère d’austérité qui prépare les jeunes gens à leurs laborieuses fonctions ; 2o l’école normale doit être essentiellement pratique et mettre continuellement des exercices à côté de l’enseignement théorique.

Je mettais donc un grand prix à voir une école normale primaire de Hollande et à juger par moi-même de l’art avec lequel on y aurait conservé tous les avantages de l’ancienne méthode en y ajoutant ceux de la nouvelle. Or, des deux écoles normales primaires de Hollande, celle de Groningue est placée à l’extrémité du royaume par-delà le Zuiderzée ; elle n’est pas entièrement établie aux frais de l’état, quoique l’état intervienne dans ses dépenses, tandis que celle de Harlem, au centre même de la Hollande, est tout-à-fait une école normale primaire du gouvernement. Fondée en 1816, elle a eu tout le temps de s’affermir, de se développer et de montrer tout ce qu’elle peut être. La réputation de son directeur est très grande dans tout le pays. M. Prinsen, que M. Cuvier avait déjà distingué comme un excellent instituteur à Harlem et comme auteur d’estimables ouvrages de pédagogie[1], passe pour le modèle des maîtres d’école. Enfin cette école normale primaire a été formée sous les yeux de M. Van den Ende, inspecteur-général de l’instruction primaire ; l’homme qui, avec le célèbre orientaliste M. Van der Palme[2], a eu la plus grande part à la loi de 1806, et surtout à l’exécution de cette loi, et qui est considéré en Hollande comme un des pères de l’éducation du peuple. Je me souviens encore de la haute estime que me témoignait M. Cu-

  1. Rapport de M. Cuvier, pag. 46.
  2. Ibid., pag. 16 et 20.