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LES RÉPUBLIQUES MEXICAINES.

son. Il faut qu’un homme soit bien coupable, qu’il ait commis bien des assassinats pour que la Thémis mexicaine se décide à le frapper et à en débarrasser la société. Le sang mexicain, disent-ils, est trop précieux pour qu’on le verse légèrement ! Si ceux qui prêchent l’abolition de la peine de mort sont allés chercher leurs argumens dans la législation criminelle du Mexique, il faut avouer que leur choix n’est pas heureux.

Pense-t-on qu’un peuple qui s’est ainsi familiarisé avec l’habitude de l’assassinat, puisse avoir une grande horreur pour les autres vices qui infectent la société ? Doit-on s’étonner que la nation soit tombée dans la dépravation la plus profonde ? Et comment en serait-il autrement, dans un pays où il n’y a ni gouvernement, ni lois, ni frein d’aucune espèce, où chacun n’a de justice à attendre que de soi-même, de sûreté à espérer que dans l’adresse et la force de son bras ? Il n’en faut pas douter, le mal vient de ce que le pays étant sans cesse agité par des révolutions aussi funestes qu’elles sont ridicules, il est impossible que les hommes bien intentionnés, s’il s’en trouve dans la république, puissent opérer les réformes salutaires, proposer les mesures que réclame l’intérêt général, et que les institutions aient le temps de s’affermir et de se consolider. Mais, nous le demandons, quels avantages peuvent résulter, pour un pays, de révolutions entreprises par un petit nombre de factieux dans la seule vue de satisfaire une ambition personnelle et un honteux égoïsme ? Une nation dont les chefs donnent l’exemple de l’immoralité, et ne se croient élevés aux premières charges de l’état que pour en exploiter les profits, et se disputer comme une proie les honneurs et la puissance, est déjà sur le penchant de sa ruine. Au reste, le peuple mexicain lui-même sait rendre à son pays la justice qu’il mérite : un des hommes les plus célèbres et les plus influens du Mexique, gouverneur d’un des principaux états, assurait que dans toute la république on ne trouverait pas vingt hommes de bien pour la gouverner !

Nous avons vu comment se faisait une révolution militaire au Mexique, esquissons maintenant la physionomie des principaux acteurs de ces drames sanglans. Les soldats sont, au Mexique, ce qu’étaient les Mameluks en Égypte, ou les janissaires à Constantinople, c’est-à-dire les maîtres ; car la nation a un grand faible pour les traîneurs de sabre ; elle ne veut, pour occuper le siége de la pré-