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REVUE LITTÉRAIRE.

2o Lettres d’Alexandre-le-Grand à sa mère Olympie et à Aristote, sur les prodiges de l’Inde, extraites du faux Callysthène, et traduites en français d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Roi. C’est une copie, ou plutôt une altération des lettres véritables d’Alexandre, que l’antiquité avait religieusement conservées. Les deux autres opuscules, Merveilles de l’Inde et Propriétés des Bestes, sont des variations françaises du même texte. L’expédition d’Alexandre dont par malheur les détails nous sont peu connus, a été, pendant le moyen-âge, un cadre de roman fantastique pour les écrivains de l’Asie et de l’Europe. On sait que notre vers hexamètre doit à cette circonstance son nom d’alexandrin. La correspondance du conquérant avec son maître était dans l’ouvrage un chapitre obligé. Chaque copiste tenait à honneur de l’enrichir, en puisant dans les compilations encyclopédiques de l’époque, ou même en se laissant aller à rêver du monde oriental. Les fragmens rassemblés par M. Berger de Xivrey se rapportent à cette coutume. Sans intérêt par eux-mêmes, ils servent de prétexte à des notes savantes que l’éditeur n’a pas épargnées.

Histoire de France. — Parmi les nombreux travaux consacrés à l’histoire nationale, le premier rang appartient à l’Histoire de la Gaule méridionale sous les conquérans germains[1]. M. Fauriel a donné sous ce titre une portion d’un grand ouvrage sur l’histoire des provinces méridionales de la France. Dans la première partie, il doit embrasser l’état de cette région, depuis les temps les plus anciens jusqu’à l’invasion des Francs ; dans la seconde, celle qui vient de paraître, il nous montre les Barbares germains en lutte contre la civilisation latine jusqu’au xe siècle, où les derniers restes de cette civilisation semblent avoir disparu. M. Fauriel n’a négligé aucun incident de ces invasions de Barbares qui se chassent et se poussent les uns les autres ; il sait nous intéresser aux généreux efforts des populations méridionales pour défendre leur indépendance et leur civilisation.

De tous ces récits, un fait ressort avec évidence, c’est que la résistance gallo-romaine n’est véritable, n’a de force et de durée que dans les populations méridionales. Au nord, au contraire, aussitôt après la conquête, les Gallo-Romains semblent ne plus exister, tant ils se sont mêlés et fondus avec la masse conquérante. On trouve bien çà et là quelques résistances individuelles, mais toutes les traces de nationalité ont disparu. C’est au midi que la lutte persiste ; la civilisation romaine y est si forte, qu’elle finit par s’assimiler les Barbares eux-mêmes. Les Visigoths deviennent contre les Francs les champions de cette civilisation qu’ils semblaient destinés à anéantir. Puis, quand ceux-ci ont succombé dans la lutte, les mêmes causes produisent sur leurs adversaires une semblable transformation.

  1. vol. in-8o, chez Paulin, rue de Seine Saint-Germain, 33.