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REVUE DES DEUX MONDES.

VAN BUCK.

Tu me feras damner ; tu es incorrigible. J’avais les plus belles espérances ; cette fille-là sera très riche un jour ; tu me ruineras, et tu iras au diable ; voilà tout ce qui arrivera. Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que tu veux ?

VALENTIN.

Vous donner votre canne et votre chapeau, pour prendre l’air, si cela vous convient.

VAN BUCK.

Je me soucie bien de prendre l’air ! Je te déshérite, si tu refuses de te marier.

VALENTIN.

Vous me déshéritez, mon oncle ?

VAN BUCK.

Oui, par le ciel ! j’en fais serment ! Je serai aussi obstiné que toi, et nous verrons qui des deux cédera.

VALENTIN.

Vous me déshéritez par écrit, ou seulement de vive voix ?

VAN BUCK.

Par écrit, insolent que tu es !

VALENTIN.

Et à qui laisserez-vous votre bien ? Vous fonderez donc un prix de vertu, ou un concours de grammaire latine ?

VAN BUCK.

Plutôt que de me laisser ruiner par toi, je me ruinerai tout seul et à mon plaisir.

VALENTIN.

Il n’y a plus de loterie ni de jeu ; vous ne pourrez jamais tout boire.

VAN BUCK.

Je quitterai Paris ; je retournerai à Anvers ; je me marierai moi-même, s’il le faut, et je te ferai six cousins germains.

VALENTIN.

Et moi, je m’en irai à Alger ; je me ferai trompette de dragons, j’épouserai une Éthiopienne, et je vous ferai vingt-quatre petits neveux, noirs comme de l’encre, et bêtes comme des pots.

VAN BUCK.

Jour de ma vie ! si je prends ma canne…

VALENTIN.

Tout beau, mon oncle ! prenez garde, en frappant, de casser votre bâton de vieillesse.