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REVUE. — CHRONIQUE.

Au dehors, beaucoup de petites nouvelles, mais peu d’importantes. En Espagne, toujours le même sommeil général. L’esprit public et la guerre civile semblent dormir pareillement. Mais la prochaine session des chambres ne tardera pas à réveiller en sursaut tout le pays. Pour l’instant, les officiers de l’armée du général Évans sont les seuls qui donnent quelque signe de vie. Au défaut des opérations militaires, ils ont organisé des courses au clocher. Des courses au clocher en Biscaye où ce n’est que montagnes et ravins ! Ces Anglais doivent être contens. Nulle part ils n’auraient trouvé d’aussi belles occasions de se rompre le cou.

En Portugal, dona Maria a dissout sans cérémonie la chambre de ses députés, parce qu’ils avaient prétendu discuter sérieusement les lois financières qui leur étaient soumises, et pour lui avoir contesté le droit d’investir du commandement de l’armée son nouvel époux. Quand nous regardions cette jeune princesse danser follement à Paris, il y a quatre ans, qui nous eût dit qu’elle serait bientôt une reine si mauvaise tête, et si peu regardante aux coups d’état ?

En Angleterre, la grande querelle entre les deux chambres n’a pas fait beaucoup de pas vers l’accommodement. Les lords sont saisis du bill des corporations irlandaises réamendé par les communes, et leurs seigneuries ne paraissent pas fort empressées de choisir entre la paix et la guerre. D’ailleurs, bien qu’il attende avec une impatience fiévreuse le dénouement de la collision, le parlement ne demeure pas pour cela inactif Diverses scènes comiques ont beaucoup égayé le débat sur la réduction des droits de timbre qu’on a votée conformément aux résolutions du chancelier de l’échiquier. L’amendement développé par M. Kearsly a surtout diverti l’assemblée. L’honorable membre avait proposé, avec une imperturbable gravité, de dégrever le savon, au lieu de dégrever les journaux Puis, durant la même discussion, est survenue l’aimable dispute entre M. Roebuck et le même M. Kearsly : M. Kearsly avait déclaré le discours de M. Roebuck dégoûtant ; M. Roebuck a déclaré que M. Kearsly ne s’était pas assez abstenu de trop boire à son dîner.

Ces gentillesses parlementaires n’ont jamais, du reste, des suites bien sanglantes, grâce à l’intervention omnipotente du speaker, qui calme les antagonistes les plus fougueux, en les faisant enfermer dans les prisons de la chambre jusqu’à complète pacification. Ainsi, et en vertu des salutaires réflexions qu’inspire la prison, s’est terminée la terrible affaire entre M. Trench et M. Wason, qui ne voulaient rien moins que s’aller entretuer à Calais. Celle de sir John Hobhouse et du colonel Sibthorp ne semblait pas devoir se conclure si aisément. Sir John, interrompu, pendant qu’il parlait, par un ricanement du colonel, avait riposté poliment : « Il n’y a rien de si sot qu’un sot rire. » Là dessus le colonel de jeter feu et flamme. Rien ne le pouvait satisfaire que le sang répandu, et voilà que soudain cette colère s’apaise et tombe devant une rétractation indirecte de sir John, et quelques avis paternels du speaker. M. O’Connel a bien eu également sa petite altercation avec M. Richards ; mais comme le grand agitateur est rigoureusement fidèle à son vœu de ne plus se battre, ses affaires d’honneur sont les plus faciles de toutes à arranger. Ces combats singu-