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LA PRESSE FRANÇAISE.

Parmi ceux qui s’adressent aux peintres, on remarque la Galerie de l’école anglaise, finement traduite par des burins anglais, et une riche collection de costumes du moyen-âge, d’après les recherches de M. Camille Bonnard, et gravée par Mercuri. — Pour les architectes, M. Bouillon a mesuré et dessiné les plus gracieuses habitations de Paris moderne. Les recueils de décorations et d’ornemens sont nombreux. Ils s’en tiennent presque toujours à la combinaison des types connus, comme si les anciens maîtres avaient épuisé toutes les sources de l’invention. — Les grands Voyages pittoresques ne souffriront pas long-temps de l’abus qu’on a fait récemment de leur plan et de leur titre. On achève lentement, afin de le rendre durable, un monument national qu’on n’a pas assez recommandé à l’attention publique. C’est le Voyage dans l’ancienne France, exécuté par nos premiers artistes. Après plusieurs années de travail, quatre provinces seulement ont été illustrées. On peut suivre d’autres voyageurs à Alger, en Espagne, au Brésil, en Grèce, et dans les ruines souterraines de Pompéi. En contemplant ces ouvrages, exécutés à grands frais, on regrette qu’ils ne puissent trouver place dans les bibliothèques modestes. Ils ne sont pas seulement des trésors d’inspiration où puisent les artistes ; on n’arriverait pas sans eux à une parfaite intelligence de l’histoire : une ruine qui fait époque, un site caractéristique, la scène d’un drame mémorable, expliquent souvent ce qui reste obscur dans les simples récits.

Grace à l’ingénieux procédé de M. Colas, la représentation des objets en relief s’opère aujourd’hui avec une précision mécanique. Les recueils de médailles y gagnent des gravures fidèles et de très bon effet. On en peut juger par le Grand trésor de Numismatique et de Glyptique, qui paraît sous le patronage de M. Paul Delaroche.

Si vraiment, ce qui ne vaut pas la peine d’être dit, on le chante, la musique aurait dû chanter 18 ouvrages sur les 19 qu’elle a produits. L’exception est faite en faveur de la Biographie universelle des musiciens, compilation utile entreprise par M. Fétis. Quant à la musique sacrée, elle n’existe plus. Nos prêtres ont laissé dépérir une des plus riches parts de leur héritage. Les vieilles méthodes de plain-chant qu’on réimprime encore, ne sont plus que des hiéroglyphes dont les chantres à gages et les serpentistes ne sauraient trouver le sens sublime.

On publie fort peu d’écrits étudiés sur les arts. En revanche, on lâche partout, et sans le moindre prétexte, des digressions sur l’art ! Il n’est pas de matière plus souple, ni plus favorable pour cacher l’absence des idées. On n’y parle que par exclamation : comparaison vaut jugement. Une sottise décemment entortillée dans une phrase à effet est applaudie comme un écart d’inspiration, et il se trouve toujours pour la répéter, de ces gens qui ont besoin d’enthousiasme, pour se donner une contenance. Au contraire, celui qui sympathise réellement avec une belle œuvre, est avare