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THOMAS MORUS.

épitaphe, composée par lui, en manière de brève histoire de sa vie.

« Thomas Morus, de la ville de Londres, né d’une famille qui n’était pas noble, mais honorable, quelque peu versé dans les lettres, ayant plaidé pendant une partie de sa jeunesse, et rendu la justice dans sa ville en qualité de sheriff, fut appelé à la cour par l’invincible roi Henry viii, le seul de tous les rois qui ait eu la gloire, jusqu’alors inouie, d’être appelé à juste titre le défenseur de la foi, rôle qu’il remplit doublement avec l’épée et avec la plume ; — admis dans son conseil, créé chevalier, trésorier et bientôt après chancelier de Lancastre, enfin, par une étonnante faveur de ce prince, chancelier d’Angleterre. Dans l’intervalle, il fut choisi par le sénat du royaume (la chambre des communes), pour être orateur du peuple (assez hardie explication du titre de Speaker), ambassadeur du roi en différens pays, et, en dernier lieu, adjoint en qualité de collègue, dans l’ambassade de Cambray, au chef de la légation Cuthbert Tunstall, alors évêque de Londres et bientôt après de Durham ; le monde n’a pas aujourd’hui un homme plus savant, plus sage, ni meilleur[1]. — Il (Morus) vit avec joie un résultat où il contribua, comme ambassadeur, les traités refaits entre les plus puissans monarques du monde, et la paix, si long-temps désirée, rendue à l’univers ; puissent les dieux l’affermir et la rendre éternelle !

« Quam superi pacem firmant, faxintque perennem !

« Durant cette carrière d’emplois et d’honneurs, où il se conduisit de telle sorte que son excellent roi voulut bien ne pas être mécontent de ses services, et qu’il ne fut ni odieux à la noblesse, ni désagréable au peuple, mais fâcheux aux voleurs, aux homicides et aux hérétiques, son père, Jean Morus, chevalier, l’un des juges du banc du roi, homme civil, agréable, inoffensif, doux, miséricordieux, juste et intègre, alors accablé d’années, mais d’un corps merveilleusement alerte pour son âge, voyant qu’il avait eu assez de jours pour être témoin de l’élévation de son fils au poste de

  1. Tunstall, quoique ayant reçu plusieurs faveurs de Henry viii, eut le courage de protester contre la prétention du roi au titre de chef spirituel de l’église catholique d’Angleterre. — Lingard, Henry viii, 258.