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REVUE DES DEUX MONDES.

M. Scribe a été inauguré dans son fauteuil d’académicien par une éloquente réponse de M. Villemain. Jamais M. Scribe n’avait été aussi finement critiqué, aussi spirituellement loué. M. Scribe est accoutumé aux succès ; mais celui-là doit compter assurément parmi les plus flatteurs. M. Scribe a été sévère pour la presse ; la presse aurait bien voulu répondre, mais elle rit encore des charmantes épigrammes de M. Scribe.

— La confédération germanique vient de rendre un décret qui oblige tous les gouvernemens allemands à intenter des poursuites contre les auteurs et éditeurs de l’association dite la jeune Allemagne, à laquelle appartient, selon la diète, M. Henri Heine. Ce brillant écrivain a réclamé contre cette décision par une lettre pleine de convenance, insérée dans le Journal des Débats. M. Henri Heine se défend, dans cette lettre, des tendances dont on l’accuse, et demande à la diète la faculté de se défendre par la presse allemande. Malheureusement, la devise de M. Dupin, libre défense des accusés, n’est pas en honneur auprès de la diète.

— Nous apprenons avec surprise qu’un article inséré dans la Revue du 15 janvier 1835, sous le titre des Indiens de la Pampa, a donné lieu à une réfutation à peu près officielle de la part du gouvernement de Buénos-Ayres. Les expressions injurieuses ne sont pas ménagées. Nous étions loin de penser qu’un article, écrit avec aussi peu de prétention que de partialité, dût exciter tant de colère. En admettant que des erreurs involontaires s’y fussent glissées, au moins ne peut-on pas s’empêcher d’y reconnaître l’absence la plus complète de haine ou de mauvaise foi.

Plusieurs phrases de l’article ont été mal interprétées ; on a affecté, par exemple, de donner un sens général et absolu à ce qui était tout-à-fait particulier ; on a pris certains mots dans une acception entièrement fausse ; ainsi, la réfutation s’irrite de ce qu’on a osé dire que le pays n’est pas cultivé ; or, d’après nos idées européennes, appelle-t-on cultivé un pays consacré à l’éducation des bestiaux, mais dans lequel on ne trouve plus de charrues ni de champs ensemencés, hors des limites toujours fort circonscrites des banlieues respectives de chaque ville.

Mais le malentendu porte spécialement sur ce que l’armée de Buénos-Ayres, sous le commandement du général Rosas, aurait rendu d’immenses services à la république. Alors il faut en conclure que les affaires ont changé de face depuis l’époque dont il est question dans l’article, époque suffisamment déterminée par des faits exacts que la réfutation n’attaque pas. Il est dit dans l’article incriminé que les trois divisions ne se réunirent point, et que le but de l’expédition fut manqué. Si l’une des trois armées, isolée, séparée des deux autres, est parvenue à faire à elle seule ce qu’il était difficile d’espérer de leurs forces réunies, ce dut