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L’ESPAGNE DEPUIS FERDINAND VII.

aux prêteurs. Fasse le ciel qu’elle leur profite ! Quant à la question financière en elle-même, elle a été posée, elle n’a pas été résolue ; elle ne le sera pas de long-temps ; elle suivra les vicissitudes de la guerre civile, mais elle lui survivra. Le temps ne manquera pas pour la traiter ; elle ne saurait l’être en passant ; la matière est ardue, elle exige une étude spéciale et un examen approfondi. Tout l’avenir de M. Mendizabal est là. Empêchera-t-il ou non la banqueroute ? L’Europe attend sa réponse.

Mais n’anticipons pas. Nous n’en sommes encore qu’à M. Martinez de la Rosa

Le résultat le plus clair et le plus net de la session a été de donner à sa retraite, reconnue bientôt comme indispensable, tous les caractères d’une nécessité, et en effet, elle a suivi de près la clôture. Il a eu cependant encore de beaux momens à la tribune ; son éloquence a remporté des victoires, mais des victoires de détail ; elle a perdu sa grande bataille.

M. Martinez, nous ne saurions trop le répéter, est un homme de parole, et son erreur radicale et permanente, celle qui lui a fait croire qu’il était homme d’état, c’est qu’il a toujours pris le discours pour l’action. Il n’a jamais su établir la distinction ni faire les deux parts. Cette erreur même prouve à quel point les passions et les instincts de l’orateur l’emportent chez lui sur tous les autres. Une harangue est à ses yeux un fait matériel, et de même que l’homme d’état véritable surveille, durant l’exécution, tous les détails d’une opération gouvernementale ; ainsi, il pousse, lui, le soin de sa parole jusqu’à la minutie ; cette sollicitude ne se borne point aux évolutions de la tribune, elle va plus loin ; on l’a vu, ce premier ministre d’une monarchie en révolution, s’enfermer des heures entières dans son cabinet, savez-vous pourquoi ? Pour corriger les épreuves de ses discours. Il n’eût pas souffert que la gazette officielle les publiât avec une virgule de moins ou une virgule de plus. Pendant ce temps, les grandes affaires restaient en souffrance, mais l’orateur était satisfait ; le ministre n’en demandait pas davantage.

Le caractère de son éloquence est la pompe ; il a besoin, pour se développer, de l’excitation de la tribune ; dans un salon, il n’a pas de conversation, dans le cabinet pas davantage. La dé-