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REVUE. — CHRONIQUE.

réforme, se manifestait. Les protestans surtout, sous le feu des persécutions religieuses, allaient rapidement et logiquement de la négation de l’autorité en matière de foi à la négation de la royauté. Étienne de la Boëtie n’avait que seize ans, lorsque, au milieu de ses études, cette vision de la république se montra à lui. Une telle idée allait à son ame nourrie de l’antique, sérieuse, pleine de foi et de vigoureuses tendances ; et, deux ans plus tard, il avait déjà écrit, à l’honneur de la liberté contre les tyrans, son discours De la Servitude volontaire, où il s’attaque ouvertement à la monarchie. Ce discours a joui, au xvie siècle, d’une grande estime, au point que la réforme, dans ses tentatives de révolution, s’en fit un instrument. Aujourd’hui sans doute les idées de ce livre n’ont plus l’importance de la nouveauté ; mais, pour être juste à son égard, il ne faut pas le déplacer de son horizon. Nous y avons senti, au travers des réminiscences de l’antiquité, une inspiration large, forte, sincère, originale, une singulière ferveur patriotique, et, dans un style ferme et noble qui se plaît aux vigoureux élans, une pensée qui n’est pas sans profondeur et qui, pour être aventureuse, n’exclut ni l’observation, ni le sentiment des réalités. Le but du livre est de démontrer que la liberté est le droit des nations, qu’elles-mêmes se font leur servitude, et que, pour en être délivrées, il leur suffirait de s’abstenir ; d’où l’auteur prend occasion d’examiner comment le despotisme, ou plutôt toute monarchie, se fonde et se maintient.

Un homme qui, pour la hauteur d’ame, la fermeté de croyance et le généreux élan, n’est pas sans ressemblance avec La Boëtie a cru que, dans le silence forcé des vivans, il pouvait être utile de ranimer la voix des morts, et il a publié une édition nouvelle du discours de La Boëtie. Dans une longue préface, écrite de ce style qu’on lui connaît, style au jarret nerveux, qui bondit et étreint comme un jeune lion, il montre que les observations de La Boëtie sur le despotisme n’ont rien perdu avec le temps de leur vérité ; mais ce qui dans cette préface nous a le plus frappés, c’est l’intention même de la préface ; c’est ce nom de La Boëtie et celui de La Mennais qui s’associent à deux siècles et demi de distance ; c’est cette voix révolutionnaire du xvie siècle, qui se répète au xixe en s’agrandissant.

Coup d’œil sur l’état de l’instruction publique en France et sur les développemens qu’elle exige, par C. P. Collard.

Cette brochure, destinée à préparer les élémens de la loi promise sur l’enseignement secondaire, présente le résultat de recherches consciencieuses et des vues pratiques exposées avec précision.