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entendre dans le Piémont, et le roi est renversé de son trône ; à Paris, des émeutes tellement violentes, que le gouvernement était menacé chaque soir d’un revirement politique. On eût dit que cette année 1820 formait le premier anneau de cet immense mouvement de juillet qui éclata dix ans plus tard. L’Autriche était particulièrement entamée par ces efforts populaires ; Naples et le Piémont embrassaient par leur extrémité les possessions autrichiennes en Italie. Les peuples s’étaient montrés, les rois se réveillèrent ensuite. Il y eut des congrès à Troppau, à Leybach, et M. de Metternich, sans hésiter, provoqua des mesures répressives contre l’esprit révolutionnaire. La conviction de M. de Metternich fut tellement profonde, qu’il s’opposa à toute espèce de retard ; il ne demanda que l’appui moral de la Prusse et de la Russie, déclarant qu’une armée autrichienne allait marcher sur l’Italie, pour occuper Naples et le Piémont. L’empereur Alexandre, alors tout agité de la peur des sociétés secrètes et des complots européens, prêta la main à M. de Metternich. Il n’y eut qu’une opposition à l’égard du Piémont, et sait-on d’où elle vint, cette opposition, tant l’histoire a été défigurée ? Elle vint de Louis xviii, et des notes de M. de Richelieu et de M. Pasquier. L’esprit révolutionnaire menaçait la France ; il éclatait par des conspirations, et la France déclarait à M. de Metternich que si les armées allemandes entraient dans le Piémont, l’occupation ne saurait être d’une longue durée, car la France ne pourrait souffrir les Autrichiens sur les Alpes.

Dans cette lutte, pour nous servir de l’expression favorite de M. Bignon, les cabinets eurent le dessus sur les peuples. Naples fut conquise en quelques marches, et le Piémont occupé par l’armée autrichienne. Le mouvement de répression étant ainsi donné, partout se développa un système combiné dans la pensée d’une suspension de la liberté politique. La guerre fut ouvertement déclarée à ces constitutions, si solennellement promises et si parcimonieusement octroyées. M. de Metternich assista au congrès de Vérone, congrès qui nous paraît la dernière expression des terreurs absolutistes à l’égard de l’esprit révolutionnaire. La France fut chargée de réprimer les cortés espagnoles, comme M. de Metternich avait été l’exécuteur armé des volontés de l’alliance contre Naples et le Piémont. Ici les royautés réussirent encore, et la révolution fut matériellement comprimée.

Tous les actes de cabinet, toutes ces proclamations qui suivirent la tenue d’un congrès, étaient spécialement l’œuvre de M. de Metternich. Le chancelier d’Autriche possède une remarquable facilité d’expressions, un goût pur, une manière noble de dire sa pensée dans ses