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qu’alors que Napoléon serait complètement préoccupé de l’expédition d’Espagne. Quand l’empereur et la garde furent partis de Paris pour relever le trône de Joseph à Madrid, quand vint la triste capitulation de Baylen, l’Autriche ne dissimula plus ses préparatifs de guerre ; elle commença ses hostilités contre les alliés de Napoléon, qui, à vol d’aigle, arriva subitement à Paris pour se mettre à la tête des armées d’Allemagne. Il y trouva encore le comte de Metternich.

La guerre d’Autriche avait été une véritable surprise. Napoléon se crut joué par M. de Metternich, et il ordonna au ministre de la police, Fouché, de le faire enlever et conduire de brigade en brigade jusqu’à la frontière. L’ordre était dur, brutal, contraire à toutes les convenances diplomatiques. Fouché, avec cette habileté qui se réservait toujours une transaction dans l’avenir, l’exécuta avec politesse ; il se fit conduire chez l’ambassadeur, lui dit les motifs de sa visite, et lui en exprima les plus vifs regrets. Ces deux hommes politiques échangèrent, dans une confidence mutuelle, quelques épanchemens sur les malheurs de la guerre et la triste ambition de l’empereur. Les ordres de Napoléon furent adoucis par le ministre, et un seul capitaine de gendarmerie, choisi par le maréchal Moncey, accompagna la chaise de poste de l’ambassadeur jusqu’à la frontière.

Quand M. de Metternich toucha le territoire autrichien, la guerre était violemment engagée. L’armée, sous l’archiduc Charles, combattait avec vaillance pour la défense de la patrie et de son souverain. La bataille d’Essling menaça la fortune de Napoléon ; l’armée française fut sur le point d’être coupée ; le génie de Masséna, éclatant sur un champ de bataille, la sauva. Preussich-Eylau, la capitulation de Baylen et la bataille d’Essling, sur le Danube, nous semblent les trois points culminans qui apprirent au monde que les armées de Napoléon n’étaient plus invincibles ; sous ce rapport, ces batailles eurent une influence morale sur les affaires de l’Europe. Il fallut les merveilles de Wagram pour rétablir le prestige du nom de Napoléon ; le champ de bataille y fut disputé, mais jamais résultat plus décisif. L’Autriche s’agenouilla pour demander la paix.

M. de Metternich n’avait point quitté le quartier-général de l’empereur d’Autriche ; il avait reçu de son souverain le titre de ministre d’état, tandis que le comte de Stadion suivait l’armée du généralissime prince Charles. La victoire avait alors prononcé entre la France et l’Autriche ; il était impossible de résister à la fortune de Napoléon. Les deux partis qui divisaient la cour de Vienne se dessinèrent plus fortement ; l’opinion de la paix, que représentaient le comte de Bubna et